Définitions de la punition, de la sanction et de leur efficacité
Dans Le petit Larousse (1998), une sanction est « une peine prévue pour réprimer l’inexécution d’une loi, d’un règlement, d’une obligation. » Quant à elle, la punition est définie comme une « peine désagréable infligée pour une faute, un manquement au règlement. » Dans ce document, nous ne pouvons pas observer de réelle différence entre ces deux termes.Pour Jacques (s.d.) la punition à base de privations n’est donnée uniquement à l’enfant lorsque la faute commise a suscité une émotion blessante, humiliante chez l’adulte. L’adulte espère à travers la punition pouvoir réparer ce qui l’a touché. La punition donnée à l’enfant qui, lui, n’a pas véritablement été blessé par la faute commise, s’avère la plupart du temps « inutile et inefficace ». En effet, l’enfant remarque rapidement que la punition dont il a écopée n’a qu’un très faible rapport avec la faute qu’il a commise, mais que c’est uniquement parce que cette faute a éveillé quelquechose chez celui qui la lui donne. De manière générale, « […] la punition réveille en eux un sentiment d’injustice très vif. ». (Jacques, s.d.). Pour Jeffrey (2000, p.6), la punition signifie pour la plupart du temps une privation quelconque. Dans différentes sociétés, nous pouvons trouver des punitions très sévères comme par exemple la lapidation en cas d’adultère. Dans une société le mot punition évoque une souffrance le plus souvent physique. Or, dans le cadre scolaire, lorsque nous parlons de punition il n’est pas question de souffrance, qu’elle soit physique ou psychologique. Même dans le cas où l’élève utilise la punition pour se faire remarquer par ses camarades, elle n’aura donc aucun effet direct sur le comportement. Effectivement, comme le dit Ayral (2010) « La sanction est recherchée parce qu’elle permet de se valoriser aux yeux des autres garçons, en se positionnant comme un chef de bande, mais aussi aux yeux des filles, celles-ci étant davantage séduites par leurs camarades qui défient l’autorité plutôt que par ceux qui la respectent. ». La punition a donc pour but de montrer aux élèves que les paroles de l’enseignant n’ont pas été dites en l’air et rend ainsi l’autorité cohérente. Jacques (s.d.) utilise le terme sanction pour définir les actes qui permettront à l’enfant de prendre conscience des conséquences de son acte (pour autrui ou pour son environnement) et ainsi comprendre que la réalité n’est pas toujours telle que nous le souhaiterions. L’adulte pourra simplement discuter avec l’enfant afin de lui faire comprendre sa faute en lui expliquant les répercussions que cela aura sur son environnement, et cela permettra à l’enfant de saisir que ses désirs ne pourront pas toujours être exaucés, et ainsi le faire entrer dans la réalité. Contrairement à la punition, la sanction n’est jamais humiliante. Selon Prairat (2002), une sanction éducative a trois fins bien définies : une fin sociale ou psychologique, une fin éthique et une fin politique. Comme le dit Beck (2009) toute sanction qui vise au moins une des trois fins suivantes est dite « éducative ».Une fin sociale ou psychologique : la sanction est comme un panneau stop. Elle est utilisée pour signifier, mettre en valeur une limite et pour stopper tout fantasme de surpuissance. Elle vise à dissuader l’enfant de persévérer dans son comportement jugé non-admissible (Prairat, 2003), et ainsi tenter de pousser l’enfant à réorienter son comportement. Une fin éthique : la sanction éducative a pour but de responsabiliser la personne qui a manqué à une règle, « en lui imputant les conséquences de ses actes ». (Prairat, 2002) Sanctionner, c’est bien en effet attribuer à l’autre la responsabilité de ses actes et même si cette attribution est constitutivement prématurée, même si elle est, stricto sensu, au moment où elle est faite, un leurre (puisque l’enfant n’est précisément pas déjà éduqué) elle contribue à son éducation en créant chez lui progressivement cette capacité d’imputation par laquelle sa liberté se construit. Celui qui a commis la faute n’aura peut-être pas agi de son plein gré, il aura peutêtre été le jouet de l’influence de son entourage ou, simplement de ses impulsions… Mais le fait de lui attribuer la responsabilité de ses actes le mettra, en quelque sorte en situation de s’interroger progressivement sur ceux-ci et d’en être, de plus en plus, le véritable auteur. (Merieu, 1991, p.110) Une fin politique : la sanction éducative n’est pas un simple rappel de l’autorité de l’adulte, de l’enseignant ou de l’éducateur. Elle est là pour rappeler la loi (c’est pour cela qu’il est important que la loi/règle en question soit de qualité) qui permet de préserver l’intégrité du groupe. Car en effet, le « vivre-avec » (autrui) est articulé au « vivre-devant » (la loi). La sanction vise la réhabilitation de la loi ainsi que de sa valeur. (Prairat, 2003) Afin que la sanction puisse accomplir sa tâche de responsabilisation, il est primordial que la sanction soit individuelle et jamais collective (Viairon, 2007). Pour Lichtle (2013), une punition est, non seulement une sanction donnée lorsqu’un comportement inadéquat a été observé, mais pour que nous puissions véritablement appeler cela une punition, nous devons observer une modification du comportement et de sa fréquence. Lichtle (2013) parle également des critères d’efficacité des punitions. Il dit que pour qu’une punition soit vraiment considérée comme efficace, il est primordial que le comportement inadéquat cesse mais, il est surtoutimportant que l’élève puisse adopter le bon comportement. Lichtle (2013) donne comme exemple un élève qui bavarde lorsque l’enseignant parle. Il explique tout d’abord que l’élève doit arrêter de parler lorsque l’enseignant parle, mais il est impératif que l’enfant adopte alors le comportement attendu ; écouter l’enseignant. Même si l’élève cesse de bavarder cela ne veut pas dire qu’il va se comporter de la manière adéquate. En effet, il est possible que l’élève ne parle plus mais qu’il n’écoute pas l’enseignant, il peut rêver ou penser à autre chose. A ce moment-là, la punition ne serait qu’à moitié efficace, étant donné que le comportement sanctionné a cessé, mais l’élève ne se comporte toujours pas de la manière attendue.
Spontanée ou réfléchie ?
Une autre question se pose : la punition doit-elle être spontanée ou réfléchie ? Est-ce que l’enseignant doit agir immédiatement et donner tout de suite la punition, ou devrait il stopper le comportement puis prendre un temps de réflexion avant de donner la punition. Selon Defrance (2003, p.45), il existe encore des enseignants qui pratiquent les châtiments corporels malgré leur interdiction. Ces derniers ont pour justification que le comportement de l’élève a éveillé chez lui un fort sentiment de colère, et que c’est un geste spontané qui en résulte. Or, s’il est pensable qu’une gifle « parte toute seule », il n’en est pas de même pour les autres châtiments. En effet, un coup de règle sur les doigts ou encore une fessée demandent une certaine mise en place, ce qui ne peut pas être fait sur le moment-même. Pourtant, selon Jeffrey (2000, p.14), la punition a pour but de responsabiliser l’élève qui a enfreint une règle. Pour ce faire, il serait préférable de stopper l’action, puis de mener une discussion avec l’élève et, seulement ensuite, de lui donner une punition si cela est nécessaire. Selon Viairon (2007), il est important d’entendre les arguments de l’enfant, ce qui tendrait plutôt à dire qu’il serait préférable de prendre un temps de réflexion et de discussion avec l’enfant avant de choisir une punition si cela est nécessaire.
Les comportements à sanctionner
Après avoir parlé de l’importance des règles, il paraît important de parler des comportements punissables. Quels sont les comportements que nous punissons, et quelles punitions devons-nous privilégier. Les premiers comportements à sanctionner sont ceux qui pourraient mettre en danger une ou plusieurs personnes. Par exemple, un élève qui tape un autre élève ou qui le pousse. Ces comportements considérés comme dangereux sont les plus souvent sanctionnés. Ensuite, les comportements qui dérangent la classe sont eux aussi souvent sanctionnés, les bavardages par exemple. Les auteurs ne donnent que très peu voire aucune information sur les comportements qui doivent être sanctionnés. Les entretiens avec les enseignants pourront, eux, me donner plus d’éclaircissements sur cette question. En effet, ce sont eux qui sanctionnent directement les comportements. Ils sont donc les mieux placés pour me donner des exemples concrets de comportements punissables, avec la manière dont l’élève sera puni pour ce comportement.
Liens avec la société actuelle
Michel Foucault dit que : Punir est un acte immémorial et universel. Même en Occident, où les mœurs se sont beaucoup adoucies depuis la fin du XVIIIème siècle avec la disparition des supplices publics, la punition reste omniprésente. L’autorité des systèmes judiciaires repose encore sur l’application de peines en cas d’infraction à la loi, ces peines variant de la simple contravention à la réclusion ou même, dans certaines régions plus rigoristes, à l’exécution. Dans la plupart des religions, les fidèles expient leurs fautes en exécutant diverses pénitences. Dans le monde du travail, on prévoit des sanctions disciplinaires telles que le blâme, voire le congédiement, à la suite de manquements à l’éthique professionnelle. Dans les sports, les arbitres infligent aux joueurs qui contreviennent aux règlements des pénalités de toutes sortes : retenue, expulsion, coup franc, etc. Malgré l’emploi généralisé de la punition dans la société, l’école contemporaine éprouve un profond malaise à son égard. […] Pourtant l’histoire de l’institution scolaire montre que la punition y a été longtemps une pratique valorisée et répandue que tout le monde considérait comme indispensable à la discipline dans la classe. (Cité par Jeffrey & Simard, 2000, p. XI) Il est donc clair que la punition a encore une grande place dans notre société.L’un des principaux buts de l’école est de former de futurs citoyens (Allanfranchini, 2014, cours 1) d’une société dans laquelle les sanctions et les punitions sont omniprésentes. Serait-il donc logique de punir les manquements aux règles puisque c’est le cas dans la société ? Toutefois aujourd’hui la punition n’est plus aussi valorisée qu’elle a pu l’être autrefois (Bar, 2011 p. 3). Faudrait-il uniquement donner des sanctions éducatives et plus de punitions ?
Entretiens avec les enseignantes
Pour mener à bien ma récolte de données je souhaite tout d’abord interviewer des enseignants exerçant dans les degrés primaires dans le canton de Neuchâtel. Je ne souhaite pas faire de sélection en genre ou en âge. Je ne vais mener que quelques entretiens, et faire une sélection n’apporterait rien à ma recherche. En effet, nous ne pouvons pas faire des liens entre l’âge, le temps d’expérience et l’usage d’une méthode punitive en nous basant uniquement sur quatre ou cinq personnes. J’ai décidé de mener à bien quatre ou cinq entretiens et je pense effectivement qu’à travers ces entretiens, une multitude d’informations sera livrée, et elles devraient suffire pour répondre à mes questions. A travers ces entretiens je souhaite interroger les enseignants sur leur méthode punitive ainsi que ses buts, ses effets et par conséquent son efficacité. Les entretiens ne devraient pas durer plus de 30 minutes. Pour réaliser mon travail, j’ai décidé de mener des entretiens semi-directifs avec des enseignants du degré primaire. Cette manière de procéder me permettra d’aborder un certain nombre de thèmes et de questions, qui auront été préparés et rédigés dans un guide d’entretien. Dans un premier temps nous aborderons les thèmes choisis mais l’entretien semi-directif permettra de discuter également d’autres thèmes, ce qui laisse une part de liberté à l’enseignant interviewé. Cette part de liberté pourrait s’avérer très intéressante. En effet, il est possible que durant cette phase, l’enseignant livre certaines informations qu’il n’aurait peut-être pas dites si une question précise lui avait été posée.
Mesures pour respecter l’éthique
Selon le code d’éthique de la recherche pour les Hautes Ecoles Pédagogiques «Toute recherche doit respecter les droits fondamentaux des personnes concernées, enfantsou adultes ». (Code d’éthique de la recherche, 2002, p.3). Selon ce premier principe, il va de soi que je m’engage à respecter les libertés d’opinions de chacun et leurs droits de me divulguer ou non des informations les concernant. Les entretiens doivent être menés avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Pour cela, j’informerai ces dernières des buts de ma recherche, des méthodes de recueil des données et des précautions que j’ai prises pour respecter la confidentialité des informations et l’anonymat des personnes en protégeant la sphère privée et les données à caractère personnel. Je me dois aussi de les informer qu’elles peuvent se rétracter à tout moment de la recherche et qu’elles ne risqueraient aucune conséquence nuisible pour elles-mêmes. Lors de la retranscription des entretiens, il est de mon devoir d’écrire mot pour mot ce qui a été dit afin de ne pas nuire à l’Institution et à la personne en écrivant de fausses informations. Une fois ma recherche terminée, j’informerai les personnes et institutions concernées des résultats de cette recherche. Je m’engage également à ne pas juger l’opinion des enseignants ainsi que la politique des institutions scolaires afin de respecter ces dernières mais aussi dans le but d’une meilleure compréhension.
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Table des matières
Remerciements
Résumé
Mots clés
Liste des Figures
Liste des Tableaux
Liste des Annexes
Introduction
1. Problématique
1.1 Définition et importance de l’objet de recherche
1.2 Etat de la question
1.2.1 Contexte historique et légal de la punition
1.2.2 Définitions de la punition, de la sanction et de leur efficacité
1.2.3 Spontanée ou réfléchie ?
1.2.4 Les règles
1.2.5 Les comportements à sanctionner
1.2.6 Liens avec la société actuelle
1.3 Question de recherche et objectifs de recherche
1.3.1 Questions de départ et objectifs de la recherche
1.3.2 Question de recherche
2. Méthodologie
2.1 Fondements méthodologiques
2.2 Nature du corpus
2.2.1 Entretiens avec les enseignantes
2.2.2 Questionnaire aux élèves
2.3 Mesures pour respecter l’éthique
2.4 Méthodes et/ou techniques d’analyse des données
2.4.1 Analyse des entretiens
2.4.2 Analyse des questionnaires
3. Résultats
3.1 Résumé des résultats obtenus
3.1.1 Résumé de l’entretien n° 1
3.1.2 Résumé de l’entretien n°2
3.1.3 Résumé de l’entretien n°3
3.1.4 Résumé de l’entretien n°4
3.1.5 Résultats des questionnaires
3.2 Analyse et interprétation des résultats
3.2.1 Constats concernant les entretiens
3.2.2 Constats concernant les questionnaires
3.2.3 Constats généraux
Conclusion
Références bibliographiques
Annexes
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