Le Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors d’une mission d’audit légal

Les récents scandales financiers d’ampleur gigantesque comme les affaires Enron (2001), Vivendi (2002), Worldcom (2002), Air Afrique (2002), Parmalat (2003), Madoff (2008) ou Satyam (2009) ont sensibilisé le grand public aux risques de fraude. Le métier de Commissaire aux Comptes a été sévèrement jugé après ces scandales financiers. Ces professionnels qui se devraient de certifier les comptes de ces entreprises ont montré de profondes lacunes et manquements au code de déontologie.

Ainsi, ces scandales ont suscité des inquiétudes légitimes qui obligent à un renforcement des systèmes de surveillance et d’alerte dans lesquels les Commissaires aux Comptes sont un élément clé. Les dispositifs réglementaires ont ainsi été revus et l’objectif originel du commissariat aux comptes qu’est la recherche de fraude est redevenu d’actualité. Tout d’abord, les Normes américaines SAS n° 82 (1998) et n° 99 (2002), toutes deux intitulées «Consideration of Fraud in a Financial Statement Audit », abordant la responsabilité de l’Auditeur en matière de fraude (ISA 240) ont été mises en place. L’Auditeur doit en effet obtenir une assurance raisonnable de l’absence d’incorrections dans les états financiers, causées par des erreurs ou par des fraudes.

Approche théorique de la fraude à caractère financier

Avant d’entamer notre étude, il sera utile de préciser les contours de la notion de fraude et des types que l’on rencontre le plus dans les entreprises. En effet, la fraude est un élément qui peut compromettre la fiabilité de l’information financière de l’entreprise et de ses parties prenantes qui ont un intérêt particulier dans les activités, les décisions ou les résultats de la structure.

Définition de la fraude

Selon la Norme ISA 240 (2006 :06), le terme « fraude » désigne un acte intentionnel commis par un ou plusieurs dirigeants, par des personnes constituant le gouvernement d’entreprise, par des employés ou par des tiers, impliquant des manœuvres dolosives (commises dans l’intention de nuire ou avec la certitude qu’un dommage s’en suivra) dans le but d’obtenir un avantage indu ou illégal.

Selon GALLET (2010 :7), la fraude est un acte accompli dans l’illégalité, consistant à tromper délibérément, à soutirer l’argent contre la volonté de quelqu’un ou à falsifier intentionnellement un document, et portant atteinte aux droits ou aux intérêts d’autrui.

L’Institut des Auditeurs Internes à travers la Norme 280 considère que « la fraude englobe un ensemble d’irrégularités et d’actes illégaux qui se caractérisent par l’intention de tromper. Elle peut être commise au profit ou au détriment de l’entreprise, par des personnes extérieures ou par ses membres ».

Notions voisines 

Après avoir défini la notion de fraude, nous pouvons aborder la signification de quelques notions voisines telles que l’erreur, le vol, l’abus de confiance et l’abus de biens sociaux.

L’erreur
Selon la Norme ISA 240, le terme « erreur » désigne une anomalie dans les états financiers résultant d’un acte involontaire, y compris l’omission d’un chiffre ou d’une information à fournir dans les états financiers.

Le vol
Selon le Code Pénal du Sénégal, « Quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est coupable de vol ». Un vol peut être commis avec effraction de la caisse comme dans les agressions avec prise d’otages. Le vol concerne souvent d’autres actifs ou biens matériels (stocks, immobilisations, etc.).

L’abus de confiance
L’abus de confiance est considéré comme un délit et est défini par le Code Pénal comme « le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé » (Art. 314-1). Bien que proche, cette infraction ne doit pas pour autant être confondue avec l’escroquerie.

L’abus de bien social
Selon GALLET (2010 :13), l’abus de bien social comprend quatre éléments :
 un usage de biens, du crédit ou des pouvoirs de la société ;
 contraire à l’intérêt social ;
 dans un intérêt personnel ;
 et de mauvaise foi.

Le plus souvent il s’agit de détournement de biens, de valeurs appartenant à la société mais aussi l’utilisation de ses matériels ou de ses salariés pour un usage personnel.

Le profil du fraudeur et les causes de la fraude

Le profil du fraudeur 

En 2011, le Cabinet KPMG a réalisé une enquête pour savoir quel était le profil du fraudeur en entreprise. Sur la base de cette étude, il a été possible de dégager le profil spécifique du délinquant économique. Le malfaiteur moyen présente les caractéristiques suivantes:
 sexe masculin ;
 âgé de 36 à 45 ans ;
 exerce ses activités dans les finances ou dans un domaine apparenté ;
 évolue parmi les cadres dirigeants ;
 travaille depuis plus de dix ans pour la même entreprise ;
 et agit avec d’autres malfaiteurs.

Nous constatons que les fraudes commises au niveau de la Direction Supérieure (Membres de la Direction Générale et Administrateurs) et des Cadres Moyens ont sensiblement diminué par rapport aux fraudes commises par les Employés sans responsabilité de Direction depuis la dernière enquête de KPMG (2007).

L’enquête de 2011 donne aussi divers indices pointant vers une fraude possible. De tels signes sont présents avant la fraude dans 56% des cas. S’ils sont reconnus comme tels, ils n’entraînent toutefois aucune conséquence.

Voici les signes annonciateurs possibles:
 Refus de vacances.
 Modifications marquantes du comportement (attitude dominante, absolutiste).
 Générosité exceptionnelle.
 Intérêt particulier pour des processus spécifiques dans l’entreprise.
 Démon du jeu / style de vie excessif.
 Documents manquants ou incomplets.

Une enquête réalisée par l’ACFE (Association of Certified Fraud Examiner) en 2008 a montré les entités qui sont victimes de la fraude ainsi que leurs tailles. Cette enquête a aussi montré la répartition des fraudes par secteurs .

Les causes de la fraude

La Norme ISA 240 (2006 :27) a donné des exemples sur les deux types de fraudes qui concernent l’Auditeur que sont la présentation d’informations financières mensongères et le détournement d’actifs. Pour chacun de ces types de fraudes, les facteurs de risques sont par ailleurs classés selon les trois conditions généralement présentes lorsque des anomalies significatives provenant de fraudes sont révélées: incitations/pressions, opportunités, et comportement/justification. En effet, selon le criminologue américain CRESSEY (1953 :47), le fraudeur est une personne qui bénéficie de la confiance de l’organisation et la transgresse ou la viole (trust violator). L’élément déclencheur selon lui est triple :
 rencontre d’une difficulté financière ;
 impossibilité de la partager pour diverses raisons ;
 recherche secrète de solutions en profitant de la confiance de son employeur.

Cette hypothèse est plus connue sous la représentation d’un « triangle de fraude » où chaque angle représente une motivation pour le fraudeur. Et selon GALLET (2010 :138), c’est la réunion de ces trois conditions qui constitue un facteur de risque. Notons que le triangle de la fraude a depuis CRESSEY été schématisé par plusieurs autres auteurs.

 La pression
Pour CRESSEY (1953 :56) toujours, le problème que doit résoudre le fraudeur est essentiellement financier. L’employé ressent une pression du fait qu’il ne peut pas partager cette difficulté avec quelqu’un et doit donc la résoudre en secret.
 L’opportunité perçue
Selon OUANICHE (2009 :50), certaines circonstances sont de nature à tenter des personnes qui, en temps normal, n’ont pas l’habitude d’agir malhonnêtement. Pour qu’une fraude puisse intervenir selon lui, il faut que son auteur ait la conviction qu’il peut agir impunément. L’insuffisance ou l’absence de contrôle interne, le manque de supervision, l’absence de séparation entre les tâches sont à l’origine de telles opportunités.
 La rationalisation
CRESSEY (1953 :65), lors de ses entretiens (avec 200 personnes condamnées pour détournement de fonds) a remarqué que les fraudeurs ont toujours une bonne raison pour justifier leur acte, non seulement après coup mais surtout en tant que facteur de motivation pour passer à l’acte. Pour comprendre cela, il est nécessaire selon lui d’intégrer au préalable que le fraudeur ne se considère pas comme un délinquant ou un voleur. Il doit donc, avant toute chose, se construire une justification morale qui lui permette d’accepter son acte et de continuer à se considérer comme une personne digne de confiance.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I : CADRE THEORIQUE DU RISQUE DE FRAUDE LORS D’UNE MISSION D’AUDIT LEGAL
CHAPITRE 1 : Approche théorique de la fraude à caractère financier
1.1 Définition de la fraude
1.2 Les notions voisines de la fraude
1.3 Le profil du fraudeur et les causes de la fraude
1.4 Les typologies de fraude et ses conséquences
1.4.1 Les catégories de fraude à caractère financier
1.4.2 Les typologies de fraude par cycle
1.4.3 Les conséquences de la fraude
CHAPITRE 2 : Le Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors d’une mission d’audit légal
2.1 De la recherche de fraude au degré raisonnable d’assurance
2.1.1 De la certitude au degré raisonnable d’assurance
2.1.2 Assurance raisonnable avec prise en compte du risque de fraude
2.2 Identification et évaluation des risques d’anomalies significatives résultant de fraudes lors de l’appréciation du contrôle interne
2.2.1 Prise en compte du risque inhérent
2.2.2 Evaluation du risque d’anomalies significatives lié au contrôle interne et prise en compte du risque de fraudes
2.2.3 Fixation du risque d’audit
2.3 La responsabilité du Commissaire aux Comptes face à la fraude
2.3.1 Responsabilité civile
2.3.2 Responsabilité pénale
2.3.3 Responsabilité déontologique
2.3.4 Cas spéciaux
2.4 Démarche de la prise en compte du risque de fraude lors de l’audit légal
2.4.1 L’esprit critique de l’auditeur
2.4.2 Concertation avec l’équipe affectée à la mission
2.4.3 Déclaration de la direction de la société
2.4.4 Communication d’anomalies provenant de fraudes
CHAPITRE 3 : La méthodologie de l’étude
3.1 Modèle d’analyse
3.1.1 Prise de connaissance de l’entreprise
3.1.2 Outils d’analyse de données
3.1.3 Le schéma du modèle d’analyse
3.2 Méthode de collecte de données
3.2.1 Méthode de collecte de données utilisée lors de l’étape de la préparation
3.2.2 Méthode de collecte de données utilisée dans la phase de terrain
PARTIE II : LA PRISE EN COMPTE DU RISQUE DE FRAUDE AU CABINET MAMINA CAMARA LORS D’UNE MISSION D’AUDIT LEGAL
CHAPITRE 4 : Présentation du Cabinet Mamina CAMARA SENEGAL
4.1 Historique du Cabinet Mamina CAMARA
4.2 Activités du Cabinet Mamina CAMARA
4.3 Organisation du Cabinet Mamina CAMARA
4.4 Présentation de la société auditée
4.4.1 Historique et organisation
4.4.2 Activités
CHAPITRE 5 : Comportement du Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors de la mission d’audit légal
5.1 Comportement du Commissaire aux Comptes sur le risque de fraude lors de la phase de maintien de la mission
5.2 Comportement du Commissaire aux Comptes sur le risque de fraude lors de la phase de prise de connaissance
5.3 Comportement du Commissaire aux Comptes sur le risque de fraude lors de la phase d’évaluation du contrôle interne
5.4 Comportement du Commissaire aux Comptes sur le risque de fraude lors de la phase de contrôle des comptes
5.4.1 Démarche d’extraction de données
5.4.2 Contrôles de détection de fraude effectués lors de la phase de contrôle des comptes à la société « Le Soleil »
CHAPITRE 6 : Présentation des résultats, analyses et recommandations
6.1 Présentation et analyse des résultats de l’étude
6.1.1 Présentation et analyse des résultats sur le comportement du Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors de la phase de maintien de la mission
6.1.2 Présentation et analyse des résultats sur le comportement du Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors de la phase de prise de connaissance de l’entité et de son environnement
6.1.3 Présentation et analyse des résultats sur le comportement du Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors de la phase d’évaluation du contrôle interne
6.1.4 Présentation et analyse des résultats sur le comportement du Commissaire aux Comptes face au risque de fraude lors de la phase de contrôle des comptes
6.2 Recommandations
6.2.1 Recommandations sur l’équipe d’audit
6.2.2 Recommandations sur le matériel informatique
6.2.3 Recommandations sur les outils d’analyse de données
6.2.4 Recommandations sur l’établissement de la lettre d’affirmation
CONCLUSION GENERALE
ANNEXE
BIBLIOGRAPHIE

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