François Souchal, après avoir longtemps étudié le XVIIIe siècle, révèle que c’est une époque qui « exalte […] l’individu, non plus seulement comme représentant de sa fonction au sein de la société, mais dans sa personnalité profonde, avec sa psychologie singulière et son authenticité physique » . C’est dans le dessein de célébrer de manière convenable l’individu que l’on multiplie son image afin qu’il laisse une trace de sa notoriété pour les générations à venir. On le magnifie par le biais de différentes représentations et c’est notamment grâce aux sculptures funéraires, érigées en leur nom, qu’ils accèdent à une renommée éternelle. On remarque qu’au XVIIIe siècle, à Rome, une sorte de mode envahit la sculpture funéraire et même si les formes en sont toujours différentes, beaucoup présentent l’effigie du défunt dans un portrait en médaillon. C’est ce goût pour cette forme, le portrait en médaillon dans la sculpture funéraire, dans ce siècle, le XVIIIe , et cette société, celle de Rome, qui sont l’objet de notre étude.
Pour pouvoir initier ces recherches, il a fallu tout d’abord mettre au point le sujet de l’étude. Il fut le fruit d’une rencontre avec Madame Daniela Gallo, professeur d’histoire de l’art moderne, qui mit à profit ses compétences en matière de sculpture, et nos envies de travailler sur cette période et sur les échanges artistiques européens. Le sujet proposé par Madame Gallo, correspondant à nos envies, s’est également révélé d’un intérêt tout particulier pour les échanges artistiques entre les siècles.
Ce fut un travail de recherche effectué sur deux années. La première fut dédiée à la constitution d’un catalogue d’œuvres, le plus exhaustif possible, consistant en une description de chaque monument et image de référence, et la seconde année fut consacrée à l’analyse de ce corpus. Le catalogue, au jour d’aujourd’hui, comporte quarante-trois oeuvres, et il s’avère qu’il n’est pas à la hauteur de l’objectif proposé, car nous avons pu identifier encore dix autres sculptures funéraires qui sembleraient pouvoir s’insérer dans notre corpus, à cause de la mention « médaillon ovale avec portrait du défunt » signalée par Alberto Riccoboni dans ses descriptions. Lors de cette découverte, il était malheureusement trop tard pour les ajouter car ne nous ne pouvions vérifier sur place s’ils existaient toujours et si la description confirmait bien la réalité.
La constitution du catalogue (vol. II et III) a nécessité une étude d’une année à Rome, partagée entre la lecture de la bibliographie que nous avons rassemblée et la recherche et l’identification in situ des œuvres concernant le sujet. C’est surtout grâce aux travaux de Diego Angeli, Le Chiese di Roma , qui répertorie tout ou la majeure partie des églises de Rome avec des descriptions de leurs intérieurs, pour chacune d’entre elles, que notre recherche des portraits en médaillon s’est avérée fructueuse et efficace. L’enquête bibliographique a alors été complétée par des descriptions, consignées dans un cahier directement sur place, collectant la nature et la forme du portrait, puis la date du monument, sa composition, sa taille, sa forme et sa situation dans l’église. Une attention particulière a été portée aux inscriptions gravées sur les monuments dont nous avons fait un relevé systématique. Cette expertise a été complétée par des clichés photographiques détaillés, qui ont permis d’étayer l’exactitude des propos tenus dans la description des notices.
Le catalogue se présente par ordre chronologique en trois parties : d’abord les monuments d’hommes laïcs, ensuite ceux dédiés aux membres masculins du clergé et enfin ceux concernant les femmes. Il est ainsi présenté car il suit l’analyse thématique que nous proposons (volume I), ce qui permet une lecture plus facile de notre propos.
Chaque notice (vol. II) renvoie en premier lieu à une planche (vol. III) qui offre une image du monument et un détail du ou des portrait(s) en médaillon. La notice présente tout d’abord le ou les défunts, les commanditaires de l’œuvre si on en a connaissance, et sa situation dans l’église. La partie descriptive débute par le portrait en médaillon, car c’est le cœur même du sujet, puis on trouve les éléments constitutifs du monument funéraire, notamment le relevé de l’épitaphe qui parfois comporte des lacunes (?), quand le texte était illisible ou manquant. Enfin, on peut lire une rapide biographie du concepteur ou du sculpteur, ou parfois même des deux, si on a réussi à les identifier, et une mise en perspective de l’œuvre dans son travail artistique. La notice se termine par une bibliographie sur le monument, le défunt, le sculpteur et l’église, chaque fois que la documentation l’a permis.
L’analyse (volume I) a été rendue possible grâce à la lecture d’une bibliographie fournie qui a éclairé les monuments identifiés, ou bien a renseigné les auteurs des sculptures funéraires, le portrait en médaillon, les éléments qui composent le monument, la Rome du XVIIIe siècle, les courants artistiques et le XVIIIe siècle en général. Ces lectures ont aidé un travail au plus près des œuvres, de focalisation du regard et de compréhension, qui ont permis à leur tout d’élaborer une réflexion qui se compose de trois parties. Tout d’abord nous avons réfléchi au succès d’un genre (Ière partie), qui se caractérise par l’affirmation du portrait en médaillon (A), repose sur la typologie du monument funéraire avec portrait en médaillon au XVIIIe siècle à Rome (B), et s’interroge sur la place des symboles (ou des attributs) et des allégories sur ces sculptures (C). Puis, nous nous sommes penchée sur les commanditaires et les destinataires de ces monuments (II), en examinant les monuments funéraires des hommes laïcs (A) car ils sont les plus nombreux dans le corpus recensé, puis des hommes du clergé (B) et, enfin, ceux des femmes (C). Pour que la compréhension de ces œuvres soit complète, on a dû mettre en perspective les monuments dans les courants artistiques qui traversent cette époque (III) et ainsi confirmer le fait que certains relèvent d’une veine du Baroque tardif (A) tandis que d’autres, plus classiques, conservent encore l’esprit de la fin du Baroque (B) alors que d’autres adoptent une veine totalement classicisante (C).
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Table des matières
Introduction
I. Le succès d’un genre
A. L’affirmation d’un type
B. La typologie du monument funéraire abritant un portrait en médaillon, à Rome, au XVIIIe siècle
C. La place des symboles (ou attributs) et des allégories
II. Commanditaires et destinataires
A. Les laïcs
B. Le clergé
C. Les monuments funéraires des aristocrates, femmes de lettres, épouses et filles
III. Le monument funéraire avec portrait en médaillon à l’aune du style
A. La « manière romaine »
B. Une nouvelle hybridation : la rencontre des « manières » dominantes
C. La « manière » classique à tendance française
Conclusion
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