Les récepteurs inonotropiques glutamatergiques AMPA et NMDA
L’épine dendritique
L’épine dendritique représente un volume confiné de 0.01-1 um3 connecté à la dendrite par un cou d’environ 0.1 um de diamètre qui lui confère ainsi des propriétés uniques (Harris and Kater 1994). Avec une capacité relativement faible à tamponner le calcium par rapport à la dendrite et une diffusion lente à travers le cou de l’épine, les transitoires de calcium qui y apparaissent auraient ainsi une capacité accrue à provoquer des changements à long terme (Sabatini, Oertner et al. 2002).
Le calcium
Le calcium a un rôle majeur dans le fonctionnement des cellules eucaryotes. La concentration de calcium libre extracellulaire est d’environ 1.5 mM (Jones and Keep 1988) alors qu’elle n’est que 100 nM à l’intérieur de la cellule, c’est à dire 15000 fois plus faible. Ceci démarque le Ca2+ de tous les autres ions communs: Na+, Cl-, Mg2+, K+.
Pour une épine dendritique de grosseur typique, i.e. de diamètre 0.5 um dont on approxime le volume par une sphère où V = 4 / 3 * pi * (d / 2)3 , le nombre théorique d’ions calcium libre dans le cytosol est de seulement 4 au repos. Une concentration aussi basse est maintenue par l’action de pompes et la liaison du calcium avec diverses protéines dont notamment la calmoduline. La concentration de calcium est contrôlée de façon serrée par la cellule (Rasmussen, Barrett et al. 1990) car une concentration élevée pendant une période de temps trop longue devient toxique (Lazarewicz and Salinska 1993). L’élévation du calcium intracellulaire peut avoir trois origines distinctes: les canaux calciques dépendants du voltage qui laissent entrer le calcium extracellulaire
lorsque l’intérieur de la cellule est dépolarisée, les canaux ioniques activés par les neurotransmetteurs dont notamment le récepteur NMDA, le relâchement de calcium des réserves intracellulaire par l’action de l’inositol triphosphate. Suite à l’entrée de calcium, des pompes calciques activées par l’hydrolyse de l’ATP déplacent le calcium intra cellulaire vers les deux principaux réservoirs de calcium: le réticulum endoplasmique et l’espace extra cellulaire en échange de deux ions H+. Un autre type de pompe utilise le gradient de l’ion Na+ et qui échange des ions Na+ pour des ions Ca2+ (Rasmussen, Barrett et al. 1990). Dû à la différence importante entre les concentration intra et extra cellulaires et à la concentration élevée de protéines capables de lier le calcium dans la cellule (~= 0.2-0.3 mM), les transitoires de calcium sont très localisés dans l’espace (~= 0.1-0.5 um) et dans le temps (~= 30 ms) (Squire 2003). Étant donné son volume confiné, la synapse représente un endroit privilégié pour décoder les transitoires de calcium.
En plus d’être porteur de charge, le calcium est un messager secondaire important. Une protéine majeure pour le décodage des transitoires de calcium est la calmoduline qui en retour se lie à un nombre important de protéines dont notamment la CaMKII. Le calcium libre dans la cellule se lie aussi directement à des enzymes comme calpain, PKC et des canaux calciques (Horn 1998) et potassiques (Vergara, Latorre et al. 1998).
La calmoduline (CaM)
La calmoduline est une petite protéine avec une séquence de 148 acides aminés (16.7 kDa) qui est très conservée parmi les espèces (la souris, le rat de Norvège et l’humain ont des séquences identiques) et qui peut lier jusqu’à 4 ions calcium lorsque la concentration intracellulaire s’élève aux alentours de 10 uM. Elle est exprimée dans plusieurs types cellulaires chez les eucaryotes. Elle est impliquée dans l’inflammation, le métabolisme, la mort cellulaire programmée, la contraction musculaire, le mouvement intracellulaire, la réponse immunitaire et la mémoire à court et long terme. Chaque ion calcium est lié à une main EF, un motif retrouvé dans plusieurs protéines liant le calcium. Ce motif est composé de deux hélices alpha liées par une boucle de 12 résidus. L’ion calcium se lie à la boucle et change ainsi la position relative des deux hélices alpha. Les deux sites de liaison en C-terminale ont une affinité 100 fois plus grande (Kd ~ 10E-7 M) que les sites en N-terminale (Kd ~ 10E-5 M) (Klee 1988). Plus de 20 protéines lient la calmoduline (Nevalainen, Aoyama et al. 1997). Parmi celles-ci, notons la calcineurine, le récepteur NMDA (Ehlers, Zhang et al. 1996) et bien sûr les CaM kinases dont la CaMKII est la mieux connue. La calmoduline lie généralement les protéines par des interactions non polaires grâce à un nombre particulièrement élevé de résidus méthionines qui deviennent exposés lors de la liaison du calcium. La liaison du calcium par la CaM est coopérative (Mamar-Bachi and Cox 1987) et cette coopération s’accroît par la liaison à une protéine cible (Klee 1988). En plus du changement de conformation lors de la liaison du calcium, l’action de la CaM peut être modulée par phosphorylation (Benaim and Villalobo 2002), acétylation (Jackson, Carraway et al. 1987), méthylation (Sitaramayya, Wright et al. 1980) et la segmentation protéolytique.
La concentration de calmoduline dans le cytosol est estimée entre 10 et 100 uM (Kakiuchi, Yasuda et al. 1982; Sharma and Wang 1988) ce qui est de 100 à 1000 fois la concentration de calcium libre et représente donc une éponge considérable pour absorber les élévations transitoires de calcium. À certains endroits restreints, la concentration de calmoduline peut être significativement plus grande. Il est estimé que les canaux calciques dépendants du voltage de type L auraient aux alentours de leur queue cytoplasmique une concentration de calmoduline atteignant 2.5 mM (Mori, Erickson et al. 2004)
La kinase calmoduline dépendante II (CaMKII)
Les kinases, qui modifient leur substrat en leur ajoutant un groupement phosphate, jouent un rôle principal dans une foule de processus cellulaires. Chez les eucaryotes, les kinases sont des protéines homologues qui représentent 1.5 à 2.5 % de tous les gènes. On peut les classifier en environ 200 familles à partir des similarités de leur domaine catalytique (Manning, Plowman et al. 2002). À tout moment du développement et suivant les types cellulaires et les tissus, seulement une fraction de ces kinases est exprimée. Parmi les kinases, la calmoduline dépendante kinase II (CaMKII) est une enzyme centrale du système nerveux et la mieux connue du groupe des CaM kinases. Elle se retrouve dans tous les tissus mais elle est particulièrement présente dans les neurones. Elle représente 1% du cerveau antérieur et 2% des protéines de l’hippocampe (Erondu and Kennedy 1985), un niveau dû à l’expression élevée de l’alpha-CaMKII (Miller and Kennedy 1985).
Cette concentration est approximativement 50 fois plus élevée qu’ailleurs dans le corps (Squire 2003). La forte expression de la CaMKII dans l’hippocampe n’est pas égale puisqu’il a été démontré que les inter-neurones de l’hippocampe n’exprime pas l’alpha- CaMKII (Sik, Hajos et al. 1998).
La CaMKII est cytoplasmique mais les variantes AlphaB, GammaA, et DeltaB peuvent être nucléaires (Hook and Means 2001). Les isoformes Alpha et Bêta sont principalement exprimées dans le cerveau alors que les isoformes Gamma et Delta sont exprimées à travers tout le corps (Squire 2003). C’est une sérine/thréonine kinase qui phosphoryle des substrats nombreux autant du côté pré-synaptique que post-synaptique. Du côté présynaptique, citons la synaptotagmine (Popoli 1993), la synaptophysine (Rubenstein, Greengard et al. 1993) et la synapsine I. Du côté post-synaptique, citons les cas particulièrement d’intérêt de la sous-unité GluRl des récepteur AMPA qui en augmente la conductivité (Barria, Derkach et al. 1997) et de la sous-unité NR2B des récepteurs NMDA. Elle s’associe en un oligomère d’environ 12 sous-unités qui s’attachent par leur
extrémité C-terminale en deux cercles superposés de 6 sous-unités (Kolodziej, Hudmon et al. 2000). Comme pour les kinases PKA et PKC, une séquence auto-inhibitrice empêche l’accès du substrat à la zone catalytique. Ses états de phosphorylation et de liaison avec la calmoduline contrôle sa localisation dans des régions précises du neurone et donc son action ciblée (Colbran, Carmody et al. 2003; Tsui, Inagaki et al. 2005).
Comme son nom l’indique, elle peut lier la calmoduline lorsque cette dernière est liée à 4 ions Ca2++. Ceci dégage le site catalytique et permet ainsi à la kinase de devenir active. De plus, lorsque deux sous-unités adjacentes dans l’oligomère lient la calmoduline en même temps, l’une d’elles devient capable de phosphoryler l’autre sur le site Thr286. La sous-unité ainsi phosphorylée devient indépendante de la calmoduline et peut donc être active au delà du transitoire de Ca2++ qui a initialement lancé le processus.
L’alpha CaMKII se retrouve seulement dans les neurones (Kolodziej, Hudmon et al. 2000) et est absente des neurones GABAergiques (Sik, Hajos et al. 1998). Dans les neurones de culture de l’hippocampe CA1-CA3, l’expression de l’alpha-CaMKII est réduite lorsque l’activité est diminuée (Thiagarajan, Piedras-Renteria et al. 2002). L’alpha CaMKII serait principalement cytosolique alors que la bêta CaMKII se lierait à la F-actin.
Une petite quantité de bêta CaMKII serait suffisante dans un hétéromère pour attirer l’alpha CaMKII à la synapse (Shen, Teruel et al. 1998). Un segment absent de l’isoforme alpha CaMKII confère la bêta une affinité accrue pour la F-actine et du fait même un rôle marqué dans la régulation de l’extension de neurites et de la formation des synapses (Shen and Meyer 1999; Fink, Bayer et al. 2003).
La bêta CaMKII demande une concentration plus petite de calmoduline que l’alpha CaMKII pour son activation. L’autophosphorylation semi-maximale est réalisée à une concentration de calmoduline de 15 nM versus 130 nM pour l’alpha-CaMKII (Brocke, Chiang et al. 1999). Ceci expliquerait pourquoi la bêta CaMKII est plus exprimée lorsque l’activité neuronale est diminuée par l’ajout de drogues (Thiagarajan, Piedras-Renteria et al. 2002).
|
Table des matières
Introduction
Le système nerveux
L’hippocampe
La mémoire et l’hippocampe
Architecture de l’hippocampe
Modification synaptique à long terme (LTP/LTD) dans l’hippocampe
L’épine dendritique
Le calcium
La calmoduline (CaM)
La kinase calmoduline dépendante II (CaMKII)
Autres kinases majeures : PKA et PKC
Les récepteurs inonotropiques glutamatergiques AMPA et NMDA
Récepteurs AMPA
Récepteur NMDA
Méthode
Modèle utilisé: cultures dissociées d’hippocampe du rat naissant
Protocole de culture
La technique du patch-clamp
Transport et mise en place de l’échantillon
Le choix des cellules
La perfusion
Obtention d’un « gigaseal »
Compensation
Le problème du bruit électrique
Le problème de la dérive de la pipette
Résultats
Tentatives de reproduction de protocoles de LTP en culture
Impact de la transfection de mutants de la CaMKII sur la force synaptique
Possible potentialisation des minis de types glutamatergiques par application prolongée d’une lumière intense
Discussion
Le mot de la fin
Références
Préparation des disques d’Aclar pour la culture de neurones
Télécharger le rapport complet