Vécu de la grossesse et de l’accouchement
En anté-natal
Au cours de l’hospitalisation d’une parturiente dans le service de grossesses pathologiques, la naissance de son enfant est anticipée ainsi que l’allaitement maternel, lorsqu’il est souhaité par la mère. Selon l’imminence de la naissance, les risques encourus pour le foetus et le terme de la grossesse, la patiente peut être amenée à rencontrer un pédiatre du service de néonatalogie au cours de son hospitalisation prénatale ; celui-ci évoque avec la patiente la prise en charge du nouveau-né de la naissance jusqu’à son hospitalisation dans le service de néonatalogie.
De plus, une visite d’un box de néonatalogie ainsi qu’une rencontre avec une infirmière de ce service sont proposés à la future maman. L’anticipation de la naissance et de la séparation de la dyade mère-enfant permet une meilleure appréhension des évènements, en diminuant l’angoisse liée à l’inconnu. De plus, la jeune mère s’accommodera d’autant plus facilement au fonctionnement du service de néonatalogie qu’elle aura déjà pu prendre quelques marques.
A la naissance
Le temps de l’accouchement est d’une très grande importance pour la création du lien entre la mère et son bébé, ainsi que pour l’initiation de la lactation. En effet, la technique de succion est plus fréquemment acquise chez les bébés restés contre leur mère avant la première tétée, sans soins de routine [7]. Cette même étude montre que les nouveau-nés restés plus d’une heure en peau à peau à la naissance ont une succion efficace en un peu moins de 50 minutes en moyenne. Les recommandations actuelles préconisent donc, dans la mesure du possible, de favoriser le peau-à-peau dès la naissance et de réaliser la première tétée au cours de la première heure de vie. On comprend donc que la séparation du nouveau-né de sa mère dès la naissance ne doit être effective que si elle s’avère nécessaire pour la santé de l’enfant ou de sa mère, et doit être accompagnée. La présentation de l’enfant à sa jeune maman, même quelques secondes, a un effet bénéfique sur le plan psychologique : elle lui permet de se réapproprier son bébé cette fois bien « réel » et de mieux assimiler les évènements vécus.
Au CHU d’Angers, la présence du pédiatre est quasi systématique lorsque l’hospitalisation néonatale était envisagée dès avant la naissance (pathologie ou malformation foetale diagnostiquée en anténatal, prématurité consentie, prématurité pronostiquée). Il prend en charge l’enfant dès sa naissance, le plus souvent accompagné du papa. Le nouveau-né est présenté à sa mère dans la mesure du possible : cela s’avère souvent irréalisable lorsque la naissance s’est faite par césarienne puisque la mère est encore au bloc opératoire lors des premiers soins du bébé. En revanche, si l’enfant est stable sur le plan cardio-respiratoire, il peut être envisagé de le présenter à sa mère si l’accouchement s’est fait par les voies naturelles.
Dans le post-partum, durant l’hospitalisation de la mère
Par la suite, l’enfant est transféré dans le service de néonatalogie par le pédiatre, accompagné du papa si celui-ci est présent et le souhaite. Une fois dans le service, les soins classiques sont effectués, et les premières explications données aux parents. La première visite de la maman dans le box de son enfant en néonatalogie se fait le plus souvent dès la fin de la surveillance du post-partum immédiat. Selon l’état de l’enfant et le souhait des parents, une mise en peau-à-peau peut parfois être effectuée, voire une première mise au sein.
Durant l’hospitalisation de la patiente pour la surveillance des suites de couche, l’accès au service de néonatalogie lui est possible 24h/24h. Les patientes césarisées sont accompagnées par le personnel soignant lors des premières visites en raison de leur incapacité à se déplacer seules ; il est proposé aux patientes mobiles de les accompagner la première fois afin qu’elles ne soient pas seules dans cette démarche éprouvante – la rencontre avec le tout-petit hospitalisé – et les visites suivantes sont le plus fréquemment faites de façon autonome par la mère. L’accouchée reçoit les soins quotidiens nécessaires par le personnel du service de grossesses pathologiques, ainsi que les conseils sur l’allaitement, l’utilisation du tire-lait, l’hygiène des seins, ou tout autre conseil adapté à la situation de la patiente. Un entretien avec une psychologue peut lui être proposé, à sa demande ou à l’initiative du personnel soignant.
En parallèle, le nouveau-né est pris en charge par l’équipe médicale et paramédicale du service de néonatalogie ; les parents reçoivent les informations sur l’état de santé de leur enfant, les soins qui lui sont apportés – auxquels ils peuvent être amenés à participer, ainsi que des conseils complémentaires sur l’initiation de la lactation. La patiente peut ainsi être accompagnée dans son allaitement indifféremment par les deux services ; il lui est proposé d’effectuer la stimulation mammaire dans l’un ou l’autre des services selon sa préférence au cours de la journée.
Les moyens actuels d’accompagnement de ces mères
La promotion de l’allaitement maternel est un problème de santé publique au vu des bénéfices qu’il apporte tant pour le nourrisson que pour sa mère : l’information puis le soutien des femmes en matière d’allaitement doit être une priorité pour nos maternités. Le rapport du Professeur Dominique Turc de juin 2010 [3] développe de nombreux moyens concrets destinés à augmenter la prévalence de l’allaitement maternel en France dans les années à venir. Concernant la prise en charge en milieu hospitalier, il est souhaitable que les professionnels de santé au contact de mamans allaitantes reçoivent une formation approprié. Le rapport du Professeur Turc indique qu’ « il est de la responsabilité des professionnels de santé de donner une information claire, objective et loyale sur la pratique de l’allaitement et sur ses bénéfices. Il est également de leur responsabilité de contribuer concrètement à le rendre possible, chacun dans la fonction qu’il occupe. »
De ce fait, l’équipe d’aides-soignantes service de grossesses pathologiques du CHU d’Angers a reçu à la fin de l’année 2013 une formation à l’utilisation d’un nouveau tire-lait pratique et simple d’utilisation. Les soignantes sont donc en mesure d’orienter et de conseiller les patientes, de leur donner les explications nécessaires pour le bon déroulement de leur allaitement. Le service de néonatalogie du CHU d’Angers propose des soins de développement pour les nouveau-nés hospitalisés : climat calme et silencieux autour de l’enfant, de son rythme de sommeil, gestes doux et enveloppants, stimulation sensorielle adaptée à l’âge gestationnel théorique de l’enfant,… [10] Le respect de la physiologie du nouveau-né est tout à fait bénéfique pour son développement neurologique et sensoriel et par conséquent pour la réussite de l’allaitement.
En parallèle, l’accompagnement des mères par les infirmières du service, y compris en ce qui concerne l’allaitement, permet à la jeune maman d’être guidée et d’acquérir les gestes et attitudes adéquats avec son enfant : mise au sein, stimulations oro-faciales sont des soins qui peuvent être pratiqués par les mères. Une conseillère en lactation, Pascale Conneau, travaille actuellement dans les services suites de couche et de néonatalogie afin d’accompagner les mères allaitantes dans le besoin. Généralement, une présentation est faite auprès des mères dont le nouveau-né est hospitalisé. La conseillère en lactation est amenée à rencontrer la femme allaitante afin de la guider lors des premières mises au sein, de la conseiller en cas de douleurs mamelonnaires, de l’accompagner dans l’utilisation du tire-lait et d’envisager avec elle l’allaitement une fois de retour à domicile.
Tous ces conseils sont dispensés au cas par cas, à la demande de la patiente ou après observation par l’équipe soignante. Les moyens humains et techniques actuellement mis en place au CHU d’Angers sont-ils suffisants pour accompagner ces mères en situation douloureuse ? Alors que la séparation de la dyade mère-enfant et l’état de santé du nourrisson peuvent parfois compliquer la mise en place de l’allaitement maternel, tout est-il mis en oeuvre pour que ce type d’alimentation fonctionne ? Dans ces conditions peu propices au bien-être de la patiente, l’équipe soignante répond-elle aux besoins des mères ? Le fait-elle de façon adaptée ? Les femmes ont-elles des demandes encore non cernées par les professionnels ?
La préparation à la naissance
La grossesse, évènement central au cours de la vie d’une femme, d’un couple, est perçue de façon très personnelle par les parturientes. Parmi les six patientes rencontrées, cinq ont débuté une grossesse volontairement et spontanément ; Mme L. a eu recours à l’AMP afin de débuter la grossesse mais n’a pas évoqué ce parcours lors de l’entretien. L’attitude face à l’arrivée de ce foetus était très différente selon les femmes : certaines étaient impatientes, et se projetaient déjà dans un avenir proche ou lointain, tandis que d’autres ont eu besoin de plus de temps pour assimiler cette nouvelle. C’est le cas de Mme G, qui a pourtant arrêté sa contraception en vue d’une grossesse : « Au bout de deux mois, je suis tombée enceinte donc euh… du coup c’était presque euh… j’étais presque pas prête en fait… ».
Les six patientes rencontrées étaient primipares, et envisageaient de faire une préparation à l’accouchement. Seules deux patientes ont participé à tous les cours, deux avaient commencé mais ont été stoppé dans le parcours à cause de l’hospitalisation ou de l’accouchement, et deux patientes étaient inscrites mais ont accouché avant la première séance. Les cours de préparation à l’accouchement étaient globalement perçus comme utiles, donnant des repères ; les patientes ont reçu des informations grâce à différents supports : exposé oral, littérature, films, témoignages. En parallèle, certaines patientes se sont préparées à la naissance et à l’allaitement maternel par leurs propres moyens : « j’avais regardé sur internet sinon… je préférais » annonce Mme T., tandis que Mme G. a pour sa part suivi les émissions de téléréalité Baby Boom (TF1 Production). Une patiente a rejoint un groupe de partage de la Leche Ligue, et plusieurs d’entre elles ont demandé conseil à leur entourage : mère, soeurs, amies ayant allaité ou l’envisageant.
A la question « Pensez-vous qu’il soit important de se préparer ? », Mme T., qui a suivi une préparation à l’accouchement dans son intégralité, répondait « Ouai, je pense… Avec tout le monde en fait… Se documenter, regarder l’évolution de tout, de la grossesse, avec les sages-femmes… Je pense que c’est important, ouai ! »
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Table des matières
SOMMAIRE
Abréviations :
Première partie : Généralités
1. Généralités
a. L’allaitement maternel
b. L’hospitalisation du nouveau-né en néonatalogie au CHU d’Angers
c. Les enjeux liés de l’allaitement lors de la séparation mère-enfant
2. L’accompagnement des mères allaitantes : un défi pour les équipes soignantes
a. Les moyens actuels d’accompagnement de ces mères
b. Les enjeux de cet accompagnement
Deuxième partie : Matériel et méthodes
1. Structure générale de l’étude
2. Modalités de la recherche
a. Population cible
b. Critère de non inclusion
c. lieu de l’étude, durée de l’étude (critères temporels et géographiques)
d. le premier contact
e. L’entretien
3. Méthode d’analyse des résultats
a. La retranscription et le codage
b. Rapprochements des différents verbatim et analyse
Troisième partie : Résultats
1. Description de la population étudiée
a. Population cible
b. Population étudiée
2. Description des conditions de réalisation de l’étude
a. Lieu de l’entretien
b. Durée de l’entretien
c. Contexte de réalisation de l’entretien
3. Vécu de la grossesse et de l’accouchement
a. La préparation à la naissance
b. Représentations de la patiente à propos de cet enfant attendu
c. Anticipation de la naissance
d. Le jour J : accompagnement des patientes
e. La rencontre avec le nouveau-né : entre bonheur et sidération
4. Place de l’allaitement maternel
a. L’allaitement, une aventure à préparer ?
b. L’initiation de la lactation
c. Bénéfices de l’allaitement maternel pour la relation mère-enfant
5. Attentes des mères durant leur hospitalisation
a. Ecoute et bienveillance : la première mission du soignant
b. Le rôle de conseil du soignant
c. Souplesse et adaptabilité des services hospitaliers
d. En pratique…
e. Place des intervenants ne faisant pas partie de l’équipe soignante
6. Rôle de l’entourage
a. Jeune père : quelle attitude adopter ?
b. La place de la famille, des amis
c. Envisager le retour à domicile
d. Les acteurs de la santé hors secteur hospitalier, un relai pour la femme
Quatrième partie : Discussion
1. Synthèse de l’étude
2. Limites et biais de l’étude
a. Choix de la population
b. Choix du type d’étude
3. Propositions de réponse aux demandes des patientes
a. Importance de l’information et du soutien dans la réussite de l’allaitement maternel
b. Le suivi de l’initiation de la lactation
c. La formation des professionnels de santé
d. L’anticipation du retour à domicile
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Résumé
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