L’eau à la bouche

Début octobre, lors de ma première journée à l’Institut Médico-Educatif (IME) dans lequel j’ai effectué mon stage cette année, les premiers jalons de ma réflexion ont été posés .

Je ne connaissais pas encore bien le polyhandicap, pathologie de près de la moitié des jeunes accueillis, et j’en avais seulement une vague représentation : je m’imaginais des jeunes très déficitaires, en fauteuil, figés dans leur corps. En seulement une journée, un point commun semblait apparaître chez une majorité d’entre eux. En effet, beaucoup avaient un rapport très particulier à leur bouche. Certains s’enfonçaient les mains dans la bouche, y mettaient des objets, criaient, suçaient leur pouce, grinçaient des dents, ou encore mordaient. Cela m’a alors interrogée, voire effrayée, car certains de ces comportements ne m’étaient pas familiers : pourquoi enfoncer sa main dans sa bouche aussi loin au risque de se faire vomir ?

Exposition du contexte

La présentation de la structure d’accueil

La population accueillie

L’établissement dans lequel j’ai effectué mon stage est un Institut Médico-Éducatif (IME). Les IME sont des établissements médico-sociaux accueillant des « enfants et adolescents atteints de handicap mental, ou présentant une déficience intellectuelle liée à des troubles de la personnalité, de la communication, ou des troubles moteurs ou sensoriels » selon la Maison Départementale des Personnes Handicapés (MDPH). L’IME a comme but de proposer à ces enfants un accompagnement général « tendant à favoriser l’intégration dans les différents domaines de la vie, de la formation générale et professionnelle ». L’IME m’ayant accueilli cette année est un établissement privé, géré par l’association Altérité. Il dépend des annexes XXIV et XXIV Ter du décret n° 89-798 du 27 octobre 1989 (1). Il peut accueillir 42 jeunes de 6 ans à 20 ans présentant une déficience intellectuelle ou étant inadaptés, et en situation de polyhandicap.

Les professionnels 

Les professionnels présents à l’IME sont catégorisés en différentes équipes, toutes assurant une fonction spécifique dans la prise en soin des jeunes. Nous retrouvons ainsi :
– L’équipe éducative : les Accompagnants éducatifs et sociaux (AES), les éducateurs spécialisés et le professeur d’activité physique adaptée
– L’équipe thérapeutique : deux psychomotriciennes, deux kinésithérapeutes, l’orthophoniste, l’ergothérapeute, et la psychologue ;
– L’équipe médicale : les infirmières, les médecins généralistes et le médecin psychiatre ;
– L’équipe de l’espace administratif : la directrice, deux chefs de service, la secrétaire de direction, la secrétaire d’accueil, et la comptable ;
– Le service technique : l’agent technique, le personnel de cuisine (deux cuisiniers et un aide cuisinier), deux femmes de ménage et cinq maîtresses de maison (une pour chaque groupe) ;
– L’équipe pédagogique : deux professeures d’école spécialisées ;
– Le service social : l’assistante sociale .

Ces professionnels, tout comme les jeunes accueillis, s’inscrivent dans un cadre spatiotemporel défini. Ce cadre permet des repères stables, assurant un sentiment de sécurité aux différents jeunes. Nous verrons néanmoins que la crise sanitaire liée à la COVID-19 a bouleversé quelques-uns de ces repères.

L’organisation spatiale de l’IME

Premièrement, il s’agit d’apprécier l’organisation spatiale de l’IME, principalement à travers sa configuration.

L’établissement, inauguré en 2008, a été conçu pour pouvoir accueillir des personnes en situation de handicap. Il est construit sur un seul étage et s’articule autour d’un axe central nommé « La rue ». Celui-ci permet de faire le lien entre les lieux de vie des jeunes et les espaces d’activités, espaces pédagogiques et espaces thérapeutiques. Deux couloirs sont adjacents à cette grande rue. L’un d’entre eux correspond à l’espace thérapeutique comprenant la balnéothérapie, l’infirmerie, les salles de kinésithérapie, de psychomotricité, d’ergothérapie, les bureaux des médecins, de l’orthophoniste et de la psychologue. Le second, équivaut lui, à l’espace pédagogique et comprend deux salles de classe, une salle de musique, d’arts plastiques, une salle Snoezelen, une salle d’esthétique, une salle sensorielle ainsi qu’un atelier cuisine. De part et d’autre de cette rue sont également situés cinq lieux de vie pour les jeunes accueillis. Chaque lieu de vie est symbolisé par une couleur (mandarine, orange, vert, rouge, mauve). Il est aménagé en fonction de l’âge des 8 à 10 enfants et/ou adolescents accueillis. Les jeunes internes, dormant à l’IME, disposent tous d’une chambre individuelle. Leur espace de vie est conçu selon un modèle domestique : salon, salle à manger, chambres, cuisine, buanderie, bureau, espace extérieur (jardin, terrasse). Les groupes “Mauve” et “Mandarine” sont les groupes d’accueil des enfants lorsqu’ils entrent à l’IME. Le groupe “Mauve” comprend des enfants présentant des troubles de la personnalité ; et le groupe “Mandarine”, comprend des enfants atteints de troubles neurologiques. Les enfants évoluent ensuite au groupe “Rouge”, ayant davantage un but d’acquisition d’autonomie. Pour finir, ils sont dirigés vers les groupes “Vert” et “Orange” pour travailler l’orientation dans une autre structure. Lise fait partie du groupe “Mandarine”. Ce groupe est composé de dix enfants ayant en moyenne neuf ans.

Par ailleurs, il existe également un espace vert et un espace de jeux entourant la structure. Il comporte des espaces de jardinage, des toboggans et autres structures de jeux destinés à proposer des expériences motrices et sensori-motrices aux jeunes. Pour finir, à l’entrée de l’IME se trouvent l’accueil, les bureaux administratifs, la cafétéria et la cuisine.

Depuis mars 2020, c’est-à-dire depuis le début de la crise sanitaire liée à la COVID-19, quinze jeunes – les externes – ne sont plus accueillis à l’IME pour réduire le nombre de personnes dans la structure (personnels et jeunes compris). Ils sont accueillis du lundi au vendredi dans un gîte situé dans une ville voisine. Deux enfants du groupe “Mandarine” y sont accueillis. Lise fait partie des jeunes qui sont restés à l’IME. Elle a donc conservé ses repères spatiaux, mais ne voit plus certains enfants et professionnels présents habituellement. L’équipe tente alors d’apporter aux enfants une continuité face à ces changements en leur parlant des personnes absentes, ou encore en leur montrant des photos d’eux.

Ces espaces fixes et délimités permettent aux jeunes de s’orienter et de se mouvoir sereinement dans cet espace. Toutefois, les repères temporels sont eux aussi centraux pour tenter de répondre à leur besoin de sécurité interne et de stabilité dans le temps.

L’organisation temporelle de l’IME

Le cadre temporel a une valeur importante dans l’institution. En effet, l’accueil d’enfants et d’adolescents atteints de Troubles du Spectre Autistique, de polyhandicap ou autres, nécessite d’amener des repères temporels stables. Les imprévus peuvent être source d’anxiété, voire de troubles du comportement chez certains jeunes. Le programme de la semaine est donc très régulier. Seuls les week ends et les vacances viennent rompre ce rythme journalier, tout en le structurant parallèlement.

Le matin, les jeunes externes arrivent à l’IME à partir de 7 h 30, amenés par des taxis ou par leurs parents. Ils restent un temps à l’accueil, permettant la transition entre l’extérieur et l’intérieur de la structure : ils sont dans l’établissement mais pas encore dans leur lieu de vie. Pendant ce temps, les internes prennent leur petit-déjeuner dans leur groupe respectif. Chaque semaine, les jeunes ont en général deux temps d’école de trente minutes. Ils bénéficient également de prises en soin en groupe ou en individuel avec les différents professionnels du paramédical (kinésithérapie, orthophonie, psychomotricité). Ces temps pédagogiques et thérapeutiques sont couplés par des temps d’activités, proposés au sein même de l’IME (ateliers conte, ateliers de soin esthétiques, musique, piscine, arts plastiques, ateliers cuisine, ateliers sensoriels, sport adapté, etc.), ou quelques fois à l’extérieur (l’équitation, des sorties au marché de la ville, des sorties culturelles, etc.). Le soir, à partir de 16 h 30, les externes se retrouvent dans l’accueil pour se préparer au départ, tandis que pour les internes, c’est l’occasion de se retrouver en plus petit comité au sein de leur groupe.

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Table des matières

Introduction
I. Exposition du contexte
1. La présentation de la structure d’accueil
2. La présentation générale du cas clinique
II. Exposition de la problématique
1. Différence entre régurgitation, reflux et vomissement
2. Contexte des moments où Lise boit l’eau
3. Conséquences sur la séance lorsque Lise régurgite
Partie théorique
I. La pathologie
1. Les définitions du polyhandicap
2. Les surhandicaps fréquents
3. La diplégie spastique
4. La sémiologie psychomotrice du polyhandicap et de la diplégie spastique
II. Le développement de l’axe corporel
1. Introduction sur l’axe corporel
2. L’axe corporel chez l’enfant né à terme
3. L’évolution de la construction de l’axe corporel
4. La verticalité
5. Les aspects pathologiques de l’axe corporel
III. Le développement de l’oralité
1. Généralités sur la bouche
2. Les bouleversements au moment de la naissance
3. Le premier semestre de vie
4. Le second semestre de vie
5. Les aspects pathologiques de l’oralité
IV. L’eau
1. Les généralités sur l’eau
2. La bouche : un orifice en balnéothérapie
3. L’eau : un médium malléable
4. L’intérêt de l’eau comme médiation pour les personnes polyhandicapées
Partie clinique
I. Choix des médiations thérapeutiques
1. Choix de la balnéothérapie
2. Choix du conte sensoriel
II. Projet thérapeutique
1. Axes thérapeutiques
2. Cadre des séances
3. Description du conte sensoriel et intérêts thérapeutiques
III. La prise en soin en psychomotricité pour Lise
1. Observations
2. Evolutions
Partie discussion
I. La pertinence du conte sensoriel
1. Les apports du conte sensoriel
2. Les limites du conte sensoriel
3. L’adaptation du conte
II. Le portage : enjeux, moyens et mise en œuvre
1. Pourquoi proposer le portage ?
2. Mais comment porter ?
3. Les différents portages proposés en séance et leurs effets
III. De la perte des enveloppes à leur reconstitution
1. La perte des enveloppes
2. La reconstitution d’une enveloppe psycho-corporelle
IV. Sur le chemin de la relation
1. La verticalité : un support ou une finalité à la relation ?
2. Une interdépendance entre régulation tonique et relation
3. Une construction multifactorielle de la relation
4. Les progrès significatifs de Lise dans la relation
V. Perspectives de prises en soin pour Lise
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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