Calcul mental et ses développements dans l’éducation des mathématiques

Calcul mental et ses développements dans l’éducation des mathématiques

Introduction et quelques définitions

Le calcul mental est un processus ou une activité qui permet d’effectuer mentalement une série d’opérations. En vérité, tout calcul est « mental » : calcul purement mental, calcul mental avec traces écrites persistantes ou temporaires et calcul écrit avec étapes mentales. Il y a aussi des calculs instrumentés avec des abaques, des bouliers ou d’autres instruments ; par ailleurs, même dans un calcul avec calculatrice, il y a une composante mentale pour contrôler les ordres de grandeur et détecter les erreurs de frappe. Le calcul mental est tout à fait différent du calcul écrit. Le premier opère simplement sur les nombres ; le calculateur fait simplement l’effort de mémoire de poser l’opération dans sa tête, tandis que le calcul écrit opère sur les chiffres, sans tenir compte des nombres, excepté pour le résultat final. Si en addition posée, on procède de droite à gauche, en addition mentale on procède inversement.

Les termes, d’une époque à une autre, ont quelque peu varié. En première approximation, on peut être tenté d’opposer le calcul mental au calcul écrit ou instrumenté. Mais pratiquer un calcul mental ne signifie pas que tout se passe sans écrire. L’expression « calcul mental » n’implique pas qu’aucun support écrit ne puisse intervenir dans la consigne, dans la formulation du résultat, voire des résultats intermédiaires (Butlen et Pezard, 2000) : l’essentiel du travail reste mental. Ce qu’on désigne sous le terme de calcul écrit (l’opération posée) requiert la connaissance des tables et la gestion des retenues, donc du calcul mental déjà mais encore trop léger. Il ne dispense donc pas de calculer mentalement, bien au contraire ; la technique écrite française traditionnelle de la division, avec ou sans les soustractions intermédiaires, requiert de nombreux traitements mentaux. Le calcul mental est une activité qui n’utilise pas nécessairement uniquement l’oral : il est parfois utile d’autoriser l’écriture de résultats intermédiaires (par exemple lors d’un calcul un peu complexe) ou d’écrire l’énoncé d’un calcul. Le calcul mental est notamment effectué « dans la tête » plutôt que sur le papier, pourtant cela n’empêche pas le besoin d’enregistrer la symbolisation pour faciliter le raisonnement mathématique (Harries et Spooner, 2000).

De plus, faisant nécessairement appel aux connaissances des nombres et des opérations mathématiques, le calcul mental fait non seulement appel à la mémoire, mais il la développe. Ensuite, exigeant une attention constante et ne pouvant pas se faire d’une manière mécanique, comme c’est souvent le cas dans le calcul écrit, le calcul mental s’avère aussi un moyen important pour développer le sens du nombre et pour acquérir une meilleure compréhension de la valeur de position et des opérations mathématiques. L’élève qui est habile en calcul mental sera plus habile à saisir les liens entre les données numériques et à les transformer.

Il y a deux caractéristiques différentes de calcul mental. Cela produit une réponse exacte, et la procédure effectuée mentalement, sans utiliser des dispositifs externes tels que le crayon et le papier. Le calcul mental est un composant important d’estimation en ce qu’il fournit la pierre angulaire nécessaire pour la diversité les processus numériques utilisés dans le calcul d’estimation. Certains des problèmes de la vie courante nécessitent le calcul mental, et d’autres nécessitent une estimation de calcul. Parfois, un problème est résolu avec le calcul mental seul ou avec une combinaison de calcul mental et estimation. Par exemple, pour trouver le reste de la différence 5 à 1, 83, l’estimation de calcul peut entraîner une réponse d’environ 3, 20. Une personne qui utilise exclusivement un calcul mental rapide rapporterait 3, 17. Bien que le calcul mental soit une partie intégrante des deux processus de solution, l’exemple précédent peut être résolu en utilisant soit l’estimation de calcul, soit le calcul mental. Il est possible d’être simultanément compétent au calcul mental et très pauvre à l’estimation. Cependant, l’inverse n’est pas vrai ; c’est-à-dire, les gens qui sont bons en estimation de calcul sont également bons au calcul mental (R. E. Reys, Bestgen, Rebolt et Wyatt, 1982). Or l’estimation est une partie importante du programme d’études de mathématiques. Elle permet, par exemple, de vérifier la cohérence des résultats lorsqu’on résout des problèmes avec une calculatrice. En effet, souvent, nous devons faire des calculs rapidement et mentalement à des moments où nous n’avons ni papier, ni crayon, ni calculatrice sous la main. Ainsi, le calcul mental ayant alors une grande utilité pratique contribue à la préparation des apprenants à la vie active. La littérature en didactique des mathématiques montre aussi que « Les élèves en difficulté en mathématiques le sont en général en calcul mental ». Tout ceci explique les enjeux de la formation au calcul mental. Pour progresser, il faut s’entrainer, mettre en place diverses stratégies pour que les choses deviennent naturelles. Le calcul mental doit occuper la place principale à l’école primaire et faire l’objet d’une pratique régulière, dès la classe de 9ème. Une bonne maîtrise de celui-ci est indispensable pour les besoins de la vie quotidienne (que ce soit pour obtenir un résultat exact ou pour évaluer un ordre de grandeur). Elle est nécessaire également à une bonne compréhension de certaines notions mathématiques (traitements relatifs à la proportionnalité, compréhension du calcul sur les nombres relatifs ou sur les fractions au collège).

Enfin, le calcul mental permet de structurer le cerveau, de façonner sa manière de réfléchir, de booster la mémoire, l’esprit d’analyse et de synthèse. Il contribue ainsi à former le talent mathématique, c’est-à-dire la pensée logique, la capacité de généralisation rapide, de réversibilité du raisonnement mathématique, la flexibilité de la pensée comme en témoigne l’existence des calculateurs prodiges dont fait partie le célèbre garçon allemand Rüdiger (Camos, 2004). Devant une multiplication ou une division qui peut paraître complexe, il va par exemple s’agir de se demander dans quelle mesure il est possible de simplifier le calcul et/ou de le décomposer pour se faciliter la tâche. Il est reconnu aussi que les lacunes en calcul de tête impactent négativement l’avenir des apprenants. Au-delà d’apprendre les tables de soustraction, d’addition et de multiplication, le calcul de tête a plus d’un intérêt, à savoir : mettre en place des automatismes, affiner son raisonnement, s’habituer à manipuler les nombres, mieux connaître les propriétés des nombres. Des études ont montré que plus l’on entraînera son cerveau à se souvenir, plus des automatismes apparaîtront et sa capacité en calcul mental sera décuplée. Certains scientifiques ont pu déterminer que le calcul mental active des zones du cerveau liées à l’attention spatiale (Krutetski, 2004). La représentation des nombres serait ainsi comparable à la représentation spatiale. Bon pour le cerveau, il permettrait de lutter contre le vieillissement et de retarder des maladies comme la maladie d’Alzheimer. Il permet aussi de faire fonctionner ses neurones à toute vitesse en s’amusant et de faire des mathématiques sans s’en rendre vraiment compte. Par conséquent, le calcul mental a tout bon.

Deux aspects de calcul mental 

Le calcul mental, exact ou approché, comporte en effet deux aspects : calcul mental automatisé et calcul mental réfléchi.

Calcul mental automatisé

Le calcul mental automatisé peut rapidement définir comme le calcul où les résultats sont immédiatement produits, de façon spontanée, sans conscience du chemin suivi. Il correspond à l’idée restrictive qu’on se fait trop souvent du calcul mental, limité à la connaissance par cœur de résultats et de règles. Le calcul automatisé vise la mobilisation automatique de résultats et de procédures (appelées faits numériques) supposées difficiles à mémoriser comme les tables d’addition, de multiplication, quelques doubles, carrés, multiplier un nombre entier par 10 ou 100. Dans ce cas, l’exigence de rapidité sera un critère de réussite. Par exemple : lorsqu’on produit un résultat pris dans les tables de multiplication, qu’on applique une technique comme la multiplication par 10 ; 100 ; 1000 ou qu’on calcule la moitié de 50. Le calcul automatisé demande peu d’effort, car il s’appuie sur des résultats complètement mémorisés et disponibles instantanément. Avant d’être automatisés, les résultats sont construits par le raisonnement, donc « réfléchis ». L’entraînement quotidien et progressif conduira l’élève à mémoriser peu à peu ces faits numériques sans le recours au calcul réfléchi (Butlen et Pezard, 1991).

Calcul mental réfléchi

Le calcul mental réfléchi est le calcul sur lequel les résultats sont obtenus par une reconstruction personnelle. De façon à se faciliter le calcul, on s’appuie sur des propriétés connues et bien maîtrisées. Les étapes sont plus nombreuses, si besoin on écrit des résultats intermédiaires. Pour un même calcul, les procédures varient selon les individus, le moment et le contexte où ce calcul est proposé. Le calcul réfléchi est d’une autre nature que le calcul automatisé. Il ne s’agit plus de récupérer directement en mémoire un résultat ou une procédure directement applicable, mais d’élaborer une procédure adaptée au calcul particulier qui est proposé. La stratégie et le raisonnement sont alors sollicités. Le calcul réfléchi (ou raisonné) consiste pour l’élève à mettre en œuvre des procédures qui relèvent d’un traitement raisonné lié aux nombres en jeu. En effet, le calcul réfléchi fait appel à l’élaboration et l’utilisation de procédures intermédiaires pour obtenir le résultat et peut faire intervenir l’écrit car les élèves peuvent avoir besoin de garder une trace écrite des étapes du calcul. L’élève doit donc adapter son raisonnement au contexte et développer la caractérisation des nombres. La rapidité, sans être complètement écartée, peut être retenue comme un critère de réussite .

D’autres représentations des nombres sont mobilisées, notamment celles qui sont liées à leur expression dans les deux systèmes de numération utilisés, numération chiffrée et numération orale. Ces deux numérations ne sont pas exactement superposables. La traduction chiffrée de « quatre-vingt-douze » ne fait intervenir ni 4, ni 20, ni 12. C’est une première raison pour laquelle il n’est pas équivalent de proposer un calcul à faire mentalement sous la forme écrite « 92 + 15 = ? » et sous la forme orale « quatre-vingt-douze plus quinze ». Une autre raison relève de la mémorisation : dans le premier cas, la consigne reste visible alors que dans le second, elle doit être enregistrée, ce qui occupera une partie de la mémoire de travail. Le calcul réfléchi peut, du fait de l’enchaînement des procédures, rapidement conduire à une saturation de la mémoire de travail (il ne peut contenir qu’un nombre limité d’informations). Pour soulager cette mémoire, il est utile d’automatiser aussi certaines techniques. En permettant à des élèves de réussir un calcul par des procédures personnelles avant de s’approprier une procédure automatisée, le calcul réfléchi est un moyen de gérer l’hétérogénéité. Examinons quelques procédures qui peuvent être mises en place pour traiter les deux calculs apparemment proches suivants : 25 × 12 et 25 × 19.

Pour calculer 25 × 12, nous utilisons les procédures suivantes :
– Procédure P1 : calcul séparé de 25 × 10 et de 25 × 2, puis somme des résultats partiels ;
i.e : 25 × 12 = 25 × (10 + 2) = (25 × 10) + (25 × 2) = 250 + 50 = 300
– Procédure P2 : décomposition de 12 en 4 × 3, et calcul de 25 × 4, puis de 100 × 3 ;
i.e : 25 × 12 = 25 × (4 × 3) = (25 × 4) × 3 = 100 × 3 = 300.
– Procédure P3 : utilisation du fait que 25 est le quart de 100, en divisant d’abord 12 par 4, puis en multipliant le résultat par 100 (ou multiplication de 12 par 100, puis division du résultat par 4) ;

i.e : 25 × 12 = 100/4 × (4 × 3) = 100 × 4/4 × 3 = 100 × 1 × 3 = 300.

Pour calculer 25 × 19, nous pouvons procéder des manières suivantes :

– Procédure P4 : calcul de 25 × 20 (directement ou par 25 × 2 × 10), puis soustraction de 25 au résultat obtenu ;
i.e : 25 × 19 = 25 × (20 − 1) = (25 × 20) − 25 = 500 − 25 = 475.
– Procédure P5 : calcul de 19×20 (par 19×2×10), puis de 5×19 (nouveau calcul réfléchi qui peut être traité par la somme de 5 × 10et de 5 × 9, par exemple), puis somme des deux résultats partiels ;
i.e : 25 × 19 = (20 + 5) × 19 = (20 × 19) + (5 × 19) = (10 × 2 × 19) + (5 × 10) + (5 × 9) = 380 + 50 + 45 = 430 + 45 = 475.

Bien que 25 soit un des facteurs des deux produits, sa présence n’induit pas les mêmes stratégies de calcul et les procédures choisies dépendent des connaissances préalables des élèves à partir desquelles ils analysent les nombres en présence. Ainsi, pour utiliser la procédure P3, il faut savoir que 25 est le quart de 100, mais aussi que 12 est un multiple de 4. Pour reconnaître que cette procédure est difficilement applicable pour 25 × 19, il faut savoir que 19 n’est pas un multiple de 4.

Par ailleurs, comme cela a déjà été souligné, le calcul réfléchi suppose la mise en œuvre, souvent implicite, de diverses propriétés des opérations en jeu. En calcul réfléchi, aucune procédure ne s’impose a priori et, le plus souvent, plusieurs sont possibles. Le travail en classe doit donc être axé sur l’explicitation et la confrontation des procédures possibles et efficaces. Aussi, un calcul réfléchi effectué mentalement mobilise une partie de la mémoire de travail, éventuellement pour le maintien de l’énoncé (s’il est donné sous forme orale) et dans tous les cas pour la représentation des règles de calcul et la mémorisation de résultats intermédiaires. Une cause possible d’erreur de calcul provient de la « saturation » de la mémoire de travail. Ce risque de saturation peut être diminué en autorisant les élèves à noter des résultats intermédiaires ou, dans certains cas, en notant au tableau le calcul à effectuer. Mais il ne faut pas oublier que le calcul mental privilégie le traitement des nombres conçus du point de vue de la numération orale: l’énoncé oral des calculs à effectuer est donc à privilégier. Le cas du calcul approché est encore plus délicat.

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Table des matières

1 Introduction générale
1.1 Contextes et problématique
1.2 Contributions
1.3 Structure du mémoire
I Cadre théorique du calcul mental
2 Calcul mental et ses développements dans l’éducation des mathématiques
2.1 Introduction et quelques définitions
2.2 Deux aspects de calcul mental
2.3 Les différentes fonctions du calcul mental
2.4 Entrainement au calcul mental
2.5 Difficulté des élèves
2.6 Numératie
2.7 Sens du nombre
2.8 Apprentissage des mathématiques
2.9 Calcul
2.10 Arithmétique mentale
2.11 Mathématiques mentales
2.12 Estimation de calcul
2.13 Conclusion
3 Stratégies de calcul mental
3.1 Introduction
3.2 Composantes du calcul mental
3.3 Stratégies de calcul mental
3.4 Conclusion
II Enseignement-apprentissage du calcul mental
4 Analyse d’enseignement-apprentissage du calcul mental à Madagascar
4.1 Introduction
4.2 Tour d’horizon des objectifs dans les programmes mathématiques
4.3 Les langages d’expression et le langage mathématique
4.4 L’enseignement de l’arithmétique
4.5 Le calcul mental dans l’enseignement
4.6 Le calcul mental dans l’école secondaire
4.7 Conclusion
5 Implications pédagogiques
5.1 Réflexion personnelle sur les avantages du calcul mental
5.2 Réflexion sur les inconvénients du calcul mental
5.3 Réflexion sur la pédagogie des calculs mentaux
5.4 Conclusion
III Analyse statistique
6 Les deux mesures de qualité : Relation entre TRI et MGK
6.1 Introduction
6.2 Théorie de Réponse aux Items (TRI)
6.3 Analyse des indices MGK
6.4 Analyse des réponses aux items proposés
6.5 Conclusion
Bibliographie
ANNEXES
Conclusion générale

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