Transports collectifs et initiative individuelle

Des mobilités aux questions de transports

Mobilités

Des mobilités à la mobilité quotidienne

La mobilité se définit comme « une forme de mouvement […] qui s’exprime par le changement de position (géographique ou sociale) »[Brunet et al., 1993]. Roger Brunet définit la mobilité sociale, professionnelle et la mobilité du travail. La mobilité qui nous intéresse est la mobilité géographique, qui correspond à « un changement de lieu » [Brunet et al., 1993]. La mobilité géographique s’inscrit dans diverses temporalités et répond à de multiples besoins. Temporaire ou durable, elle permet d’accéder au travail, au ravitaillement et au ressourcement. En ce sens, elle est toujours liée aux différentes facettes de la mobilité sociale. Roger Brunet souligne également le caractère bénéfique de la mobilité, qui permet le renouvellement et s’oppose au conservatisme [Brunet et al., 1993]. Les points de vue sur la mobilité sont multiples et largement influencés par les injonctions économiques et les courants de pensée. Ainsi être plus mobile, plus flexible et plus réactif revient à être plus productif. La mobilité devient ainsi une valeur du « nouvel esprit du capitalisme » et participe d’une certaine fugacité des modes de vie [Boltanski and Chiapello, 1999]. Finalement, quelle que soit la grille de lecture adoptée, nous avons une image « positive, à la fois descriptive et prédictive, de la mobilité comme forme de liberté » [Bacqué and Fol, 2007]. En tant que phénomène social et spatial, la mobilité structure et est structurée à la fois par la société et l’espace dans un jeu de rétroactions complexes. Ainsi mobilité résidentielle et mobilité quotidienne s’influencent l’une l’autre, tout comme la mobilité sociale. Dans des espaces de vie structurés par la position sociale, l’ancrage local et la mobilité sont paradoxalement valorisés [Berroir et al., 2017]. Les choix de lieux de résidence et de travail n’ignorent pas les possibilités de déplacement au quotidien. La capacité à se rendre sur un lieu de travail, ou de déménager pour cela, joue un rôle dans l’intégration dans une nouvelle classe sociale. Inversement, les lieux de résidence connotés freinent l’entrée dans de nouvelles sphères professionnelles ou sociales [Bonvalet and Brun, 2002]. Les différents aspects de la question des mobilités recouvrent à la fois une dimension tangible, mesurable, composée de mouvements effectifs et une dimension plus abstraite, potentielle, qui forme la possibilité du déplacement. Chacune de ces acceptions donne lieu à des tentatives d’analyses et de mesures. Nous nous intéressons particulièrement à la mobilité quotidienne. Ce choix implique que nous nous plaçons dans une temporalité plus courte que si nous nous intéressions aux mobilités résidentielles. La mobilité quotidienne est liée à l’évolution de la ville sur le temps long. Cependant nous sommes dans une démarche compréhensive du fonctionnement quotidien et nous ne prenons pas en compte les mécanismes génératifs de la mobilité. Nous cherchons à comprendre leurs modes de fonctionnement, non pas leur apparition, sans ignorer bien entendu le contexte dans lequel les mobilités quotidiennes se déroulent.

Les enjeux de la mobilité

Injonction économique et impératif écologique
La mobilité est présentée comme la condition d’une attractivité et d’une compétitivité suffisante dans le cadre de la mondialisation. Les territoires sont ainsi en concurrences sur la scène économique. Attirer les activités et la population s’avère nécessaire. Pour participer aux échanges internationaux, il faut une bonne accessibilité, et ce à plusieurs échelles. Ce travail s’intéresse à la mobilité quotidienne intra-urbaine. Cette échelle est tout aussi importante dans la mondialisation. Un territoire compétitif est, entre autres, un territoire de connexions et connecté, où le déplacement est rapide et efficace. Le bon fonctionnement de la mobilité repose sur un système de transport et des infrastructures performantes. En effet, de bonnes infrastructures facilitent la mobilité. Une augmentation de la mobilité entraîne une augmentation de la concurrence et d’échanges. Ceux-ci saturent les axes de circulation et la congestion fait diminuer l’attractivité et la compétitivité. Les infrastructures doivent donc s’adapter en permanence à l’augmentation de la mobilité [Carpentier, 2007]. La mobilité peut donc être considérée comme une ressource dans un raisonnement économique. Elle représente un moyen d’attirer de la main d’œuvre et des clients pour les entreprises, mais aussi des activités pour les aménageurs. Cependant, comme toute ressource, la mobilité a une dimension environnementale importante.

La mobilité est génératrice d’externalités négatives directes : pollution atmosphérique et sonore, embouteillages, insécurité … L’automobile est le principal mode de transport utilisé en France et plus largement en Europe. Au-delà des émissions de polluants qui impliquent un risque sanitaire, elle fonctionne la plupart du temps à partir d’énergies non renouvelables. L’utilisation de carburants propres ne résout qu’une partie des problèmes de l’automobile. De sa construction à la fin de son utilisation, elle génère nombre de déchets assez peu recyclables. La dégradation des cadres de vie liée aux aménagements routiers et les embouteillages ne sont pas réglés par des énergies renouvelables [Giraud, 2010]. Ces dernières doivent également être examinées précisément. Une voiture électrique qui se rechargerait d’énergie nucléaire ne mériterait pas le qualificatif de « renouvelable » ou de « durable ». D’un autre côté, les biocarburants ont des conséquences sur la répartition du foncier agricole dans les pays producteurs, une pression supplémentaire s’exerce sur les cultures alimentaires. Ainsi, promouvoir une utilisation raisonnée de l’automobile semble nécessaire pour des raisons environnementales. Les impératifs économiques de la mobilité nous empêchent de promouvoir simplement une diminution des déplacements. Cependant, favoriser le report modal vers des transports plus propres s’impose. Les transports collectifs apparaissent, en complément de modes doux non motorisés, comme une solution intéressante sur ce point. Les déplacements groupés sont moins polluants.

Finalement, la mobilité pose la question des limites environnementales, économiques et physiques de notre organisation sociale. L’augmentation de la mobilité participe du réchauffement climatique. L’accès à la mobilité conditionne l’intégration dans la société : que faire pour les plus pauvres ? En termes d’aménagement, la ville est submergée par l’afflux des automobiles et l’espace manque pour les modes doux et les transports collectifs [Orfeuil, 2014].

Une dimension sociale au-delà de la mobilité ? 

En croisant ces analyses sociales et des réflexions plus spatiales sur les déplacements, les problématiques du droit à la mobilité peuvent être appréhendées. La mobilité traduit une injonction sociale forte, elle correspond aujourd’hui à un besoin. Trouver une place dans la société actuelle implique pour un individu de pouvoir se déplacer. L’emploi est souvent conditionné par le fait de disposer d’un permis de conduire et d’un véhicule. Mais certaines enclaves restent difficiles d’accès et leurs habitants partiellement excluent de la mobilité. Finalement, le « surplace géographique » condamne au « surplace social » [Breton, 2005]. Le droit à la mobilité fait partie des programmes publics depuis 1982 en France avec la Loi d’Orientation sur les Transports Intérieurs. L’objectif est de permettre l’accès à la mobilité pour tous. Cela se traduit concrètement avec des mesures telles que le Permis à un Euro par jour ou les bus de nuit. La mobilité est également intégrée dans les projets d’aménagement de l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine. Cependant, après une quinzaine d’années d’actions institutionnelles, le problème n’est pas résolu : la proportion des ménages non motorisés du premier décile augmente, les transports collectifs sont moins utilisés par les plus pauvres pour se rendre au travail et les dépenses de mobilité engloutissent jusqu’à 20% des revenus de nombreux précaires [Orfeuil, 2011]. En effet, l’amélioration de l’accès à la mobilité pour le plus grand nombre n’est pas à elle seule une solution aux inégalités sociales.

Elle entraîne une augmentation de la concurrence pour l’accès à l’emploi et au foncier. Dans cette situation, les plus démunis restent les plus vulnérables. Mis au ban des zones les plus demandées, ils sont victimes d’une exclusion sociale qui diminue leur réseau. De la même manière la ségrégation fonctionnelle éloigne les précaires de certains services. Ces deux processus pourraient être compensés par une augmentation de la mobilité, mais c’est un cercle vicieux : les plus en difficulté restent les premiers exclus de la mobilité. Les inégalités ne seront donc pas comblées uniquement en augmentant la mobilité générale [Orfeuil, 2004].

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Table des matières

Introduction Générale
I Partie 1 : Mobilité et transports en commun
1 Des mobilités aux questions de transports
1.1 Mobilités
1.1.1 Des mobilités à la mobilité quotidienne
1.1.2 Les enjeux de la mobilité
1.1.3 Gérer la mobilité ?
1.1.4 Dimensions spatiales de la mobilité
1.2 Le transport non institutionnel
1.2.1 Définition des termes
1.2.2 Le transport artisanal dans le monde
1.3 Étudier le transport artisanal : quels défis, quelles solutions ?
1.3.1 Des approches multiples
1.3.2 Dans l’opérationnel
1.4 Enjeux et positionnement de la recherche
1.4.1 Construire une démarche adaptée
1.4.2 Proposer une approche objective ?
1.5 Conclusion du chapitre 1
2 Les transports collectifs artisanaux
2.1 Lima et Brazzaville : trajectoires et contextes
2.1.1 Histoire urbaine de « Lima la horrible »
2.1.2 Brazzaville la verte
2.2 Acteurs et agents du transport artisanal
2.2.1 Organisation des transports artisanaux à Lima
2.2.2 Organisation des transports artisanaux à Brazzaville
2.3 Des cas d’étude représentatifs ?
2.3.1 La gestion des itinéraires
2.3.2 La gestion des fréquences
2.3.3 D’une typologie à ses limites
2.4 Conclusion du chapitre 2
II Partie 2 : Du terrain à la modélisation
3 Une démarche de géographie dynamique
3.1 Les structures émergentes du transport artisanal
3.1.1 Données disponibles et Données collectées
3.1.2 Les structures émergentes
3.1.3 Limites du raisonnement
3.2 De la complexité à la modélisation multi-agents
3.2.1 Les concepts clés de notre approche
3.2.2 Appréhender la complexité
3.3 Conclusion du Chapitre 3
4 Modélisations appliquées de transports artisanaux
4.1 Démarche expérimentale
4.1.1 Nos hypothèses
4.1.2 Protocole expérimental
4.1.3 Quelle plateforme choisir ?
4.1.4 La démarche ODD pour présenter nos modèles
4.2 Présentation du modèle BrazzaBus
4.2.1 Vue d’ensemble
4.2.2 Concepts d’élaboration
4.2.3 Détails
4.3 Le modèle de Lima
4.3.1 Vue d’ensemble
4.3.2 Concepts d’élaboration
4.3.3 Détails
4.3.4 Deux modèles aux caractéristiques distinctes
4.4 Résultats
4.4.1 Les variables de sortie : différents types d’efficacité
4.4.2 Variation de la demande
4.4.3 Confrontation des simulations aux systèmes observés
4.5 Conclusion du Chapitre 4
III Partie 3 : Transports artisanaux et villes théoriques
5 Proposition de modélisations abstraites
5.1 Le modèle jouet
5.1.1 Éloge de la simplicité
5.1.2 Résultats
5.2 Le choix et la construction des environnements
5.2.1 Réseaux et Demandes
5.2.2 Nombre de bus et Prix du ticket
5.2.3 Expériences
5.3 Résultats
5.3.1 Stratégie de gestion des itinéraires
5.3.2 Stratégie de gestion des fréquences
5.4 Conclusion du chapitre 5 .
6 Vers des contextes de prédilection
6.1 Hiérarchisation des variables, analyse des effets
6.1.1 Le choix de la méthode de traitement : ANCOVA
6.1.2 Variables structurantes pour le rendement
6.1.3 Variables structurantes pour la répartition de la desserte
6.1.4 Variables structurantes pour la rentabilité du système
6.2 Ce que nous apporte la comparaison
6.2.1 Des contextes de prédilection
6.3 Une solution pour le transport collectif de demain ?
6.3.1 Quels leviers d’action ?
6.3.2 Apports de l’intelligence distribuée
6.3.3 Libéralisation du service, pas de l’emploi
6.4 Conclusion du Chapitre 6
Conclusion
Bibliographie

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