Modélisation des rotors fissurés : État de l’art

Les arbres de machines tournantes constituent des structures assez complexes à analyser. Suivant les applications auxquelles ils sont destinés, ils sont souvent composés de plusieurs tronçons et soumis à des sollicitations d’origines diverses. L’étude de la dynamique d’un arbre affecté de fissuration est un problème délicat qui recouvre différents aspects techniques et mathématiques. L’analyse d’un tel système nécessite une modélisation appropriée tant pour la fissure que pour l’arbre.

Modélisation des structures fissurées

Aux USA, une grande partie des centrales de production d’électricité ont été construites au cours des années 60 et dimensionnées pour une durée de vie de 30 ans [44]. La crise énergétique des années 70 a conduit à un ralentissement de la construction de nouvelles centrales. Malgré l’inspection des machines avant le démarrage et au cours de l’exploitation, un grand nombre de ruptures d’arbres dues à la présence de fissures ont été enregistrées. D’après Bently [18], durant une période de 10 ans, au moins 28 cas de rupture ont été enregistrés dans l’industrie de l’énergie aux USA.

Depuis les années 80, l’intérêt des chercheurs à caractériser les structures comportant des fissures ne fait que croître. Entre le début des années 70 et la fin des années 90, plus de 500 articles concernant les structures fissurées ont été publiés [44]. Dans les 10 dernières années, on a pu compter, outre les papiers présentés pour des congrès ou des conférences spécialisés, plus de 1200 articles dont plus d’une centaine est consacrée au rotors. En effet, outre l’industrie de l’énergie, les rotors sont omniprésents dans les industries aéronautique, aérospatiale, automobile et même une industrie plus légère telle que celle de l’électroménager (machine à laver,…). L’étude du comportement vibratoire d’un arbre fissuré recouvre plusieurs branches de la mécanique et des mathématiques. Il s’agit d’un système non-linéaire complexe nécessitant, pour une description pertinente, une modélisation fine et précise de l’arbre ainsi que des fissures permettant l’identification et le calcul des paramètres caractérisant leur présence. L’analyse des études menées pour la modélisation des rotors fissurés montre que les modèles actuels reposent sur deux principes fondamentaux :

• la représentation de la section fissurée par une flexibilité locale,
• la prise en compte d’un mécanisme d’ouverture-fermeture de la fissure, encore appelé respiration. Nous présentons, ci-dessous, les règles générales qui déterminent la prise en compte de ces deux principes en dynamique des rotors.

Modélisation de la section fissurée par une flexibilité locale

La présence d’une fissure dans un élément de structure conduit à une concentration d’énergie à proximité des lèvres et introduit une flexibilité locale. Ceci est connu depuis longtemps. Kirmsher [76] et Thomson [112] sont les premiers à avoir essayé de quantifier la réponse vibratoire d’une structure en présence d’une discontinuité due à une petite rainure. La discontinuité, au niveau de l’entaille, a été modélisée soit par un moment de flexion additionnel local, soit par une réduction locale de la section transversale de l’élément dont l’estimation était basée sur des résultats expérimentaux. Les premières tentatives d’analyse et de calcul de la flexibilité locale d’une région fissurée d’un élément de structure sont dues à Irwin [72, 73], Bueckner [24, 25], Westmann [122] en reliant la flexibilité locale aux facteurs d’intensité de contraintes.

Liebowitz et al. [80, 79] et Okamura et al. [92] ont examiné les effets de la présence d’une rainure sur la stabilité au flambage élastique des colonnes. En combinant les résultats de la mécanique de la rupture aux résultats expérimentaux de Brown et al. [23], ils ont proposé une formule pour l’identification de la flexibilité locale d’une poutre de section rectangulaire fissurée en flexion. Anifantis [6] a suivi la même formulation pour l’examen de stabilité des colonnes fissurées, ensuite Dimarogonas [38], dans les années 80, pour examiner la stabilité des anneaux et des tubes comportant des fissures longitudinales. Anifantis et Dimarogonas [8, 9] ont poursuivi l’étude de stabilité des colonnes fissurées sous différents cas de chargement et en représentant la fissure par une flexibilité locale calculée à partir des concepts de mécanique de la rupture.

Dans deux notes techniques à la NASA, Gross et Srawley [60, 61] ont identifié les coefficients d’intensité de contraintes et les termes de la matrice de flexibilité locale pour des éléments fissurés soumis à des efforts de flexion et de traction. Ils ont, en particulier, identifié les termes de couplage. De même, Rice et Levy [103] ont examiné ce couplage dans leur étude des plaques élastiques fissurées. Dimarogonas et Paipetis [45] , Dimarogonas [39, 40, 41], et Anifantis et Dimarogonas [7] ont introduit la matrice de flexibilité (6 × 6) d’une section fissurée. Ils ont noté qu’elle contient des termes extra-diagonaux conduisant au couplage des vibrations longitudinale et transversale. En négligeant les effets de torsion, ils ont évalué les termes de cette matrice (5 × 5) pour une section rectangulaire contenant une fissure transversale. Papadopoulos et Dimarogonas [98, 99, 100], et Ostachowicz et Krawczuk [94] ont évalué tous les termes de la matrice (6 × 6) d’une section de poutre de Timoshenko fissurée pour tout cas de chargement.

Dans le cas d’une géométrie cylindrique telle que celle des rotors de turbines, il n’existe pas d’expressions analytiques des facteurs d’intensité de contraintes, ce qui a conduit Dimarogonas [45] à discrétiser la surface fissurée en un ensemble d’éléments indépendants. Sur chacune de ces surfaces élémentaires, les coefficients d’intensité de contraintes peuvent être approchés par des formules analytiques [111].

Mécanisme de respiration de la fissure

Le second principe essentiel de la modélisation des structures fissurées est la prise en compte d’un mécanisme d’ouverture fermeture de la fissure. Pour mettre en évidence ce mécanisme, considérons une poutre simplement appuyée, soumise aux effets uniques de son poids propre et à une rotation imposée autour de son axe. On suppose également que cette vitesse de rotation imposée est faible. La poutre de section circulaire comporte à mi-portée une section fissurée. La fissure est à fond droit et sa profondeur a est inférieure au rayon de la section. Pour une section non fissurée, les efforts appliqués à la poutre conduisent à une répartition antisymétrique du champ de contraintes par rapport à la fibre neutre. Lorsque la poutre tourne, la partie fissurée passe périodiquement de zones tendues (lorsqu’elle est en bas) à des zones comprimées (lorsque elle est en haut) et par conséquent elle s’ouvre et elle se ferme périodiquement : on dit qu’elle respire .

Ainsi, selon la position angulaire de la fissure, celle-ci est soit en compression, donc fermée, soit en tension, alors ouverte, soit enfin dans une situation intermédiaire ce qui l’amène à être partiellement ouverte. Ces deux derniers cas conduisent à des répartitions de contraintes locales très différentes de celles de la section non fissurée.

La non-linéarité engendrée par ce mécanisme induit des comportements vibratoires particuliers qui peuvent constituer des éléments de détection dans le cadre d’une procédure de surveillance. Cependant, l’examen des différentes tentatives de modélisation du comportement de la fissure au cours de la vibration, montre qu’on peut distinguer deux grandes familles de modèles de fissures :
• Les premiers, encore utilisés pour l’exploration de la réponse dynamique des rotors fissurés, supposent que la fissure reste toujours ouverte durant la rotation de la structure. Ces modèles sont connus sous le nom de modèles de fissure ouverte (open crack models),
• la seconde famille de modèles, considère le mécanisme de respiration décrit ci-dessus. On parle alors de modèles de fissure respirante (breathing crack model ou closing crack model ).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
1 Modélisation des rotors fissurés : État de l’art
1.1 Introduction
1.2 Modélisation des structures fissurées
1.2.1 Modélisation de la section fissurée par une flexibilité locale
1.2.2 Mécanisme de respiration de la fissure
1.3 Vibrations des rotors fissurés
1.4 Présentation du modèle de fissure développé à EDF
1.5 Conclusions
2 Poutre fissurée en flexion avec prise en compte des effets de cisaillement
2.1 Présentation
2.2 Rappel sur les poutres de Timoshenko
2.2.1 Champ de déplacement de Timoshenko
2.2.2 Tenseurs de déformations et de contraintes
2.2.3 Efforts intérieurs
2.2.4 Equations d’équilibre
2.3 Modèle de poutre fissurée
2.3.1 Description du modèle
2.3.2 Problème de Saint Venant
2.4 Formulation du problème d’élasticité avec contact unilatéral
2.4.1 Motivation
2.4.2 Conditions aux limites
2.4.3 Equations du problème
2.4.4 Remarques sur la réalisation des conditions aux limites avec le Code_Aster c
2.4.5 Propriétés de la fonction énergie
2.5 Equations d’équilibre de l’élément de poutre fissuré
2.6 Loi de comportement de la section de poutre fissurée
2.6.1 Souplesse apportée par la section fissurée
2.6.2 Expression de la loi de comportement
2.6.3 Identification de la rigidité de l’élément discret
2.7 Étude du problème « plan »
2.7.1 Ecriture discrétisée de la fonction souplesse
2.7.2 Application de la démarche à une fissure à fond droit de profondeur 50%
2.7.3 Validation du modèle
2.7.4 Conclusions
2.8 Étude de la flexion bi-axée avec prise en compte des effets de cisaillement
2.8.1 Ecriture de la fonction énergie
2.8.2 Prise en compte des effets de cisaillement
2.8.3 Loi de comportement de la section fissurée
2.8.4 Application de la démarche à une fissure à fond droit de profondeur 50%
2.8.5 Validation du modèle
2.9 Quelques remarques sur la prise en compte de la torsion
2.10 Conclusions
3 Rotors fissurés : Exploration numérique de quelques modèles simples
3.1 Présentation
3.2 Rappel sur les schémas d’intégration numérique utilisés
3.2.1 Le schéma de Newmark
3.2.2 La méthode d’intégration numérique α de Hilbert, Huygues et Taylor (HHT)
3.2.3 Les méthodes de Runge-Kutta
3.3 Discrétisation des signaux
3.3.1 Problème d’échantillonnage
3.3.2 Transformée de Fourier tronquée ou Discrète (TFD)
3.3.3 Transformée de Fourier rapide : FFT
3.4 Système dynamique à deux paramètres
3.4.1 Description
3.4.2 Loi de comportement de la section fissurée
3.4.3 Les équations dynamiques du système
3.4.4 Cas d’un rotor sans fissures
3.4.5 Etude de rotors en présence de fissures
3.4.6 Baisse de la vitesse critique due à la présence de fissures
3.4.7 Forme des orbites et des diagrammes de phase en présence de fissures
3.5 Etude de la vibration d’un rotor fissuré en flexion
3.5.1 Prise en compte des effets d’amortissement
3.5.2 Présentation de quelques résultats
3.5.3 Prise en compte des effets de cisaillement
3.6 Construction d’un élément fini de poutre fissuré
3.6.1 Etude du comportement vibratoire d’un rotor fissuré en flexion
3.7 Conclusions
Conclusion générale

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *